[Replay] Former les étudiants à de nouvelles compétences à l’aune de l’économie numérique

Répercussion de la crise sanitaire sur les formations et la pédagogie, nouveaux modèles d’enseignement avec des certifications tout au long de la vie, attentes renouvelées des entreprises sur les compétences des diplômés… Autant de sujets abordés lors du webinaire « Nouveaux métiers, l’employabilité des étudiants à l’aune de l’économie numérique » organisé en partenariat avec Microsoft le 1er février 2022 à l’occasion de Think Éducation & Recherche 2022.

Cycle : Campus Matin

Les établissements prêts lors du premier confinement

Une bascule numérique rapide

Les intervenants du webinaire de Think 2022 sont unanimes : les établissements étaient prêts à enseigner à distance lorsque le premier confinement de mars 2020 a contraint à la fermeture.

Yannig Lavocat est responsable du service Digital Learning de Kedge BS - © D.R.
Yannig Lavocat est responsable du service Digital Learning de Kedge BS - © D.R.

« La force des écoles de management est qu’elles ont su répondre à la fois aux étudiants et en back office pour accompagner les enseignants. Nous avons fait preuve d’une grande réactivité en proposant des emplois du temps identiques », se souvient Jean-François Fiorina, directeur général adjoint de Grenoble école de management (GEM).

« Nous avons mis seulement sept jours pour passer en 100 % distanciel sans pour autant faire du présentiel en distanciel. Grâce aux outils, la proximité pédagogique a été maintenue. Le socle technique a parfaitement fonctionné. Des formations ont soutenu les enseignants pour qu’ils retravaillent leur posture et transforment une classe virtuelle en un moment fort », dit Yannig Lavocat, responsable du service Digital Learning de Kedge business school.

Des étudiants habiles avec le numérique 

À CY Tech, l’échelle est différente, mais les publics sont déjà habitués aux outils numériques. « Par leurs formations d’ingénieurs, nos étudiants baignent dans le numérique. Ils ne découvraient pas le monde virtuel. Cependant, certains étudiants ont manifesté des difficultés à vivre les cours à distance. Nous avons dû faire face à de nouveaux problèmes », admet Olivier Colas, directeur des relations entreprises chez CY Tech.

Une adaptabilité nécessaire aussi du côté des enseignants-chercheurs. « Nous évoluons dans un environnement concurrentiel où les métiers, les formations, les entreprises, les académiques font preuve d’adaptation face à la transformation digitale. La crise nous a incités à réagir rapidement. Nos amplitudes horaires se sont élargies, mais ce fut une bonne expérience pour montrer la réactivité de chacun », selon Besma Zeddini, enseignante-chercheuse en intelligence artificielle et en cybersécurité à CY Tech.

Impact sur les formations : des étudiants « augmentés et certifiés »

De nouvelles attentes de la part des entreprises…

Jean-François Fiorina est directeur général adjoint de Grenoble école de management - © Agence Prisme / Pierre Jayet
Jean-François Fiorina est directeur général adjoint de Grenoble école de management - © Agence Prisme / Pierre Jayet

Les demandes des entreprises évoluent face aux compétences attendues. « Désormais, les entreprises attendent des étudiants dotés de spécialisations et notamment de compétences certifiées. Ils doivent maitriser le management, mais aussi des compétences qui ont trait à l’éthique, à la géopolitique, à la transformation écologique », indique Jean-François Fiorina.

Ces nouvelles attentes de la part des entreprises impactent les pédagogies des établissements. « Nous devons proposer différents types de formations et pédagogies : l’expérimentation, la transversalité, l’hybridation, la pluridisciplinarité… Les étudiants que nous formons aujourd’hui affronteront des situations que nous ne connaissons pas encore. C’est fascinant ! », affirme le directeur de GEM.

… et de nouvelles approches pédagogiques des formations

Yannig Lavocat relève aussi de nouvelles approches pédagogiques nécessaires à la formation « d’étudiants augmentés » : « Les attentes du monde de l’entreprise face aux étudiants en école de management sont qu’ils soient augmentés par des compétences techniques et digitales, pas pour devenir développeur informatique, mais pour être capable de dialoguer avec eux et de comprendre le monde numérique, en étant éclairés et ancrés dans la création de valeur. »

Cette ouverture d’esprit nécessaire aux étudiants est également avancée par les intervenants de CY Tech. Un socle commun de formation se complète forcément par des aptitudes à regarder le monde qui les entoure.

« En entreprise, le dialogue est permanent entre les fonctions finances, marketing, sales. Cette porosité doit aussi ressortir dans notre pédagogie. CY Tech s’attache à ce que les étudiants soient conscients des réalités du monde de l’entreprise. Une préoccupation qui concerne aussi les enseignants. Eux aussi doivent mieux connaître l’entreprise », détaille Olivier Colas.

Embaucher des compétences opérationnelles

Des entreprises à la recherche de diplômés opérationnels

Un diplôme agrémenté de briques de certifications pour des compétences opérationnelles semble désormais être une marque de différenciation pour une meilleure employabilité des étudiants. « Les entreprises cherchent des cadres supérieurs formés par les établissements d’enseignement supérieur et, à la fois, des compétences opérationnelles, que l’on peut certifier », selon Armelle Elkhabli, CEO d’OpenCertif.

Béatrice Matlega est directrice des partenariats et des programmes d’éducation chez Microsoft - © D.R.
Béatrice Matlega est directrice des partenariats et des programmes d’éducation chez Microsoft - © D.R.

« Les entreprises connaissent une très forte transformation et sont à la recherche de personnels maitrisant, par exemple, parfaitement le cloud. Les certifications Microsoft dans ce domaine renforcent l’employabilité des étudiants et assurent aux entreprises qu’elles embauchent bien des compétences tout de suite opérationnelles », poursuit-il.

Cette approche des recruteurs « soulève une autre question », selon Béatrice Matlega, directrice des partenariats et des programmes d’éducation chez Microsoft, qui est celle « de la collaboration entre les écoles et les entreprises comme la nôtre pour accompagner à l’acquisition de compétences supplémentaires ».

Des certifications proposées par les écoles en plus du diplôme

Une entreprise est rassurée de recevoir un étudiant avec un certificat

GEM propose déjà des certifications à ses étudiants et imagine aller encore plus loin dans la démarche. « Dans les années à venir, nos étudiants auront un diplôme qui marque un niveau et un potentiel, et des certificats qui correspondront à des compétences particulières. Une entreprise est rassurée de recevoir un étudiant avec un certificat. Le challenge pour nous est de nouer des relations de coopération avec les éditeurs et les certificateurs pour avoir une bibliothèque de certifications, voire des certificats spécifiques selon les établissements, ce qui fera une réelle différence pour les étudiants », selon Jean-François Fiorina.

Le responsable du service Digital Learning de Kedge, Yannig Lavocat confirme la tendance en émettant la possibilité de « concevoir un cours autour d’une certification pour que l’étudiant obtienne un niveau attendu par le marché. On augmente le certificat pour imaginer un produit de formation unique qui capitalise sur la qualité de l’éditeur ou du partenaire ».

Des enseignants au cœur du dispositif

Une telle approche s’accompagne d’un rôle renforcé de l’enseignant qui « va scénariser son cours, créer et assembler des compétences dans un objectif de certification. C’est ainsi le grand retour de la pédagogie de base », pour Jean-François Fiorina.

La démarche implique des enseignants au niveau, « gage d’une formation d’excellence pour les étudiants », selon Olivier Colas pour qui l’attractivité de l’école s’en trouvera renforcée.

Besma Zeddini est enseignante-chercheuse en intelligence artificielle et en cybersécurité à CY Tech - © D.R.
Besma Zeddini est enseignante-chercheuse en intelligence artificielle et en cybersécurité à CY Tech - © D.R.

« En tant qu’enseignante, je vais aussi passer des certifications. Ce qui montre mon engagement dans une démarche de travail collaboratif entre académiques et professionnels pour aboutir à l’objectif commun : la transformation numérique rapide des entreprises », témoigne Besma Zeddini.

Dans un contexte de mutation et d’accélération où « les jeunes d’aujourd’hui occuperont une douzaine d’emplois différents », selon Armelle Elkhabli, les diplômes courts, accompagnés de certifications complémentaires tout au long de la vie, semblent mieux répondre aux besoins des entreprises et de la société.

Pas de retour au « monde d’avant » avec le présentiel

« Les étudiants sont avides de connaissances et de compétences, nous devons en tenir compte dans l’organisation de nos cursus. Mais ils sont aussi attentifs à la transition écologique et choisissent des entreprises vertueuses dans ce domaine », constate Jean-François Fiorina.

Ainsi, après les périodes en distanciel, le retour de l’apprentissage en présentiel doit avoir un impact positif. « Les étudiants attendent de nouvelles façons d’apprentissage avec notamment des moments d’échanges avec les entreprises, leur venue sur le campus pour travailler sur des projets concrets et non plus des cas fictifs », souligne Yannig Lavocat.

Investir et mutualiser

Olivier Colas est directeur des relations entreprises chez CY Tech. - © Brian Ravaux
Olivier Colas est directeur des relations entreprises chez CY Tech. - © Brian Ravaux

Jean-François Fiorina rappelle aussi que le numérique a un coût : « Il faut former les enseignants, les étudiants, investir dans les systèmes et leur maintenance pour que tout fonctionne parfaitement bien. L’erreur absolue est de penser que le distanciel ne coûte rien. Au contraire, il coûte très cher. Le modèle de mutualisation ou d’alliance entre écoles et éditeurs est un modèle d’avenir. »

« Créer un cours en ligne, c’est bien. Le maintenir et adopter de nouvelles postures d’animations en ligne assurent sa pérennité », admet Yannig Lavocat.

Le gageur de tels investissements tient dans « notre capacité à absorber les coûts additionnels sans impacter les frais de scolarité des étudiants, c’est essentiel. Cela passe par de nouveaux modèles d’alliances », affirme Olivier Colas. 

Demain, tous métavers ?

« Cela va arriver. Le métavers* est la prochaine étape », affirme Béatrice Matlega.

« Nous préparons un cours sur le métavers. Il faudra en tenir compte. Ce monde virtuel peut être intéressant pour des publics empêchés de venir sur nos campus, comme les étudiants étrangers ou les sportifs de haut niveau. Ce peut être un moyen d’accéder à un nouveau produit pédagogique. Mais n’oublions pas l’essence même de la formation dans nos établissements : les copains de promotion et les fêtes ! », pour Yannig Lavocat.

Même approche pour Olivier Colas : « Il existe déjà des salons virtuels. C’est un outil qui peut avoir son utilité. Mais attention à une utilisation à bon escient. Depuis la crise sanitaire, les étudiants demandent du présentiel. Beaucoup ont été marqués, voire pénalisés et attendent désormais des cours et des événements physiques. »

*Le metavers désigne un univers virtuel numérique accessible avec le matériel adéquat, dans lequel les utilisateurs réalisent des actions en incarnant des avatars.