Favoriser les écosystèmes régionaux entre universités, organismes et entreprises

Quelles synergies sont mises en place entre universités, organismes de recherche et entreprises pour contribuer à l’innovation ? Quels financements pour développer les écosystèmes régionaux ? Quelles bonnes pratiques pour favoriser le transfert de technologie et comment en mesurer l’impact ? Des questions débattues lors du webinaire Campus Matin en partenariat avec Elsevier, le 12 décembre 2024.

Cycle : Campus Matin

Des actions menées à différentes échelles

«Sur le transfert et l’innovation, on compte tant d’échelons — européen, national, territorial et local — que certains parlent de “millefeuille”, relève Jean-Philippe Braly, journaliste spécialiste recherche à News Tank Éducation & Recherche.

François Germinet était directeur du pôle connaissances au SGPI et devient conseiller spécial du ministre Philippe Baptiste. - © Université de Lille
François Germinet était directeur du pôle connaissances au SGPI et devient conseiller spécial du ministre Philippe Baptiste. - © Université de Lille

En réalité, tous les organismes de valorisation de la recherche — Sociétés d’accélération du transfert de technologies (Satt), instituts de recherche technologiques (IRT) et instituts pour la transition énergétique (ITE) — ont bien saisi l’impératif de jouer sur ces différents niveaux d’action.

En témoigne François Germinet, alors directeur du pôle connaissances au Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) : “Notre méthode, via le plan d’investissement national France 2030 ? Lancer des appels à projets pour repérer les synergies locales plutôt que de décider de manière top down. C’est une prime à la compétence, à l’énergie et à la cohésion des territoires.

Xavier Apolinarski, président du réseau des Satt, confirme cette approche multidimensionnelle. “Les Satt ont une capacité d’action à deux niveaux, expose-t-il. D’une part, une dynamique hexagonale, pour répondre aux stratégies nationales d’accélération. D’autre part, des réponses à des enjeux plus territoriaux.

Des alliances universitaires pour booster l’innovation et le transfert

Elles se multiplient, là encore à différentes échelles.

Sur le plan national

Udice est l’alliance de 13 universités intensives de recherche françaises pour favoriser partage des moyens et financements. “Nous nous battons pour favoriser le changement culturel et renforcer la perméabilité de l’université avec le monde socio-économique”, détaille Cédric Denis-Rémis, vice-président développement innovation et entrepreneuriat de PSL. Autre outil de convergence : les pôles universitaires d’innovation.

Au niveau européen

Max Dumoulin est vice-président innovation d’Elsevier. - © D.R.
Max Dumoulin est vice-président innovation d’Elsevier. - © D.R.

L’Université de Quatrième Génération est un projet co-porté par l’université néerlandaise de technologie d’Eindhoven et Elsevier. “Objectif : aider les entités d’éducation et de recherche à démontrer leur impact au niveau régional, pour obtenir de nouveaux budgets et mieux valoriser les équipes dans les classements nationaux et internationaux, développe Max Dumoulin, vice-président innovation d’Elsevier. Nous sommes en train de recruter les early adopters, pour un lancement officiel en juin 2025.”

Des réalisations spectaculaires…

Les succès français se mesurent d’abord en chiffres. “Les Satt, c’est un milliard d’euros investis, pour 3 000 projets maturés, 4 000 brevets déposés et 750 start-up créées”, énumère François Germinet.

Mais aussi par un retour sur investissement hors pair. “Ces start-up ont aujourd’hui une valorisation cumulée de l’ordre de 3,5 milliards d’euros. Auxquels il faut ajouter 6 000 emplois créés, ainsi que l’impact sur les PME. Pour résumer, 1 euro investi en maturation en génère 21 en valeur économique”, pointe Xavier Apolinarski.

Une manne qui ruisselle sur les territoires concernés : 60 % des transferts réalisés par les Satt nourrissent des acteurs territoriaux, pour 50 % via la création de start-up, 40 % les PME et 10 % les grands groupes. “Nous nourrissons l’économie industrielle de demain”, souligne Xavier Apolinarski.

Des pistes de progression qui subsistent

En dépit des importants progrès réalisés, plusieurs volets restent à améliorer.

Booster la dimension innovation

Michel Mariton est vice-président innovation à l’Université Paris Saclay. - © D.R.
Michel Mariton est vice-président innovation à l’Université Paris Saclay. - © D.R.

Notre établissement est en tête des classements de recherche, mais il nous reste une marche à franchir pour avoir le même ranking sur la dimension innovation”, remarque Michel Mariton, vice-président innovation à l’Université Paris Saclay.

Se connecter davantage aux grands programmes européens

Il faudrait multiplier les initiatives en vue de faire coïncider financement européens, nationaux et locaux en matière de transfert”, estime François Germinet, conseiller spécial de Philippe Baptiste, devenu ministre en charge de l’enseignement supérieur et la recherche à partir du 8 janvier 2025.

Développer des collaborations dans le temps long

Pour ce faire, il convient de continuer à développer les laboratoires communs, qui permettent de s’engager à long terme avec les entreprises”, recommande Michel Mariton.

Brasser les gouvernances

Michel Mariton appelle aussi de ses vœux le brassage des gouvernances entre universités et entreprises.

Mobiliser pleinement les SHS dans la course à l’innovation

Cédric Denis-Rémis est VP développement innovation et entrepreneuriat de PSL. - © Marie Sorribas/PSL
Cédric Denis-Rémis est VP développement innovation et entrepreneuriat de PSL. - © Marie Sorribas/PSL

Il reste des poches de résistance, notamment dans les sciences humaines et sociales”, relève Jean-Philippe Braly. Cédric Denis-Rémis rebondit : “Nous y travaillons et avons de plus en plus de projets de prématuration.

L’université, vecteur d’ancrage de l’innovation

L’innovation s’étale sur des cycles longs, entre trois et dix ans, observe Xavier Apolinarski. Une démarche dans laquelle l’université a un rôle de catalyseur, mais aussi de stabilisateur.” Michel Mariton ajoute : “Ce qui prime, c’est la formation et les étudiants, pour alimenter l’innovation à tous les niveaux, et pas seulement au post-doc”, relève-t-il.

L’université de demain, à l’interface des attentes de la société

L’université veut désormais être actrice de son écosystème. “L’évolution de ses missions la place en interface de la société civile, en matière d’innovation, d’impact et de création de valeur”, applaudit Cédric Denis-Rémis.

Jean-Philippe Braly conclut : “On sent un mouvement collectif pour une marche commune des différents sites universitaires vers le transfert, la valorisation et l’innovation. Une évolution positive et enthousiasmante.