Apprentissage des langues : les clés pour engager les étudiants

L’apprentissage des langues illustre parfaitement le besoin de transformation profonde de la pédagogie, marquée par une accélération technologique forte. Un webinaire Campus Matin, en partenariat avec PrepMyFuture, a livré des clés pour engager et faire progresser les étudiants plus rapidement.

Cycle : Campus Matin

L’enseignement supérieur et la recherche connaissent aujourd’hui une transformation rapide, portée par l’émergence de l’intelligence artificielle. L’apprentissage des langues est particulièrement touché par le développement des traducteurs automatiques et un besoin d’interactivité accru.

Dans ce contexte, il devient essentiel de repenser l’efficacité des cours mais aussi les dispositifs d’évaluation. Le défi est aussi de faire du numérique un véritable levier pédagogique, capable de répondre aux attentes des nouvelles générations. L’enjeu de l’articulation entre présentiel et digital se pose également, tant pour la motivation que pour la performance des apprenants.

Personnalisation, disponibilité des ressources… Les atouts du numérique

Une chose est certaine : sans un engagement personnel minimum et une pratique régulière, les progrès restent difficiles à atteindre.

« On constate que la technologie a permis de faire un bond dans l’apprentissage des langues, notamment grâce à la personnalisation. C’est l’un des atouts majeurs des nouveaux outils. Dans une salle de classe avec de nombreux étudiants, il est désormais possible de cibler les besoins spécifiques de chacun et de se concentrer sur les points à renforcer », explique Agnès Rémond, chief learning officer de Learnation, dont font partie PrepMyFuture et 7Speaking.

Elle ajoute : « La disponibilité des ressources 24 heures sur 24 constitue également un avantage considérable. Cela permet à chacun d’apprendre à son propre rythme, en combinant un apprentissage formel avec des contenus plus informels, liés aux séries, à la culture ou au sport, selon ses centres d’intérêt. »

Former étudiants comme enseignants

Isabelle Konuma est vice-présidente déléguée aux formations et professeure des universités à l’Inalco.  - © D.R.
Isabelle Konuma est vice-présidente déléguée aux formations et professeure des universités à l’Inalco. - © D.R.

L’usage des technologies, et en particulier de l’intelligence artificielle, a fait l’objet d’une étude approfondie au sein de l’Inalco. « On constate d’abord que les étudiants sont souvent plus avancés que nous dans l’usage de l’IA générative, comme ChatGPT, mais aussi en matière de traduction, observe Isabelle Konuma, vice-présidente déléguée aux formations et professeure des universités à l’Inalco. On ne peut donc plus faire comme si cela n’existait pas. L’enjeu est désormais d’accompagner cette transformation. »

L’enquête menée fait le point sur les usages actuels, tout en anticipant les besoins des enseignants. Si ces derniers manifestent un réel intérêt pour les outils technologiques, ils restent encore peu nombreux à les utiliser concrètement. Ainsi, seuls 12 % d’entre eux ont intégré l’IA dans leurs pratiques d’évaluation. L’intérêt grandissant se porte davantage sur la production de contenus pédagogiques, comme l’élaboration de plans de discussion ou la transcription de documents audio et vidéo.

Cependant, Isabelle Konuma rappelle aussi l’importance de la formation : « Il est essentiel d’être formé pour utiliser l’IA de manière pertinente, afin de ne pas perdre le regard critique nécessaire dans le travail demandé. Il faut évidemment éviter les simples copiés-collés. »

Développer des compétences dans un contexte d’enseignement de masse

Laurent Rouveyrol est professeur des Universités à la Sorbonne Nouvelle. - © D.R.
Laurent Rouveyrol est professeur des Universités à la Sorbonne Nouvelle. - © D.R.

À l’université, ces problématiques prennent une dimension plus large. L’Université Sorbonne Nouvelle accueille aujourd’hui quelque 30 000 étudiants, dont environ 10 000 suivent un enseignement en langues. « À nous de faire en sorte que le terreau soit le plus fertile possible pour favoriser le développement des compétences, dans un contexte d’enseignement de masse. L’enjeu est donc de travailler à la fois sur le plan collectif et individuel », explique Laurent Rouveyrol, directeur du centre des langues de l’Université Sorbonne Nouvelle.

Il souligne que la grande nouveauté réside dans la disponibilité généralisée des ressources en ligne, mais aussi dans l’évolution des compétences des étudiants. « Grâce à Internet, les élèves sont devenus plutôt bons en compréhension orale, sans doute à force de regarder des séries sur les plateformes », remarque-t-il.

Face à ces évolutions, l’université met en place des centres de ressources en langues permettant un travail autonome et les premières formes d’évaluation. Elle propose également des ressources pour un apprentissage en présentiel ou en distanciel, via diverses plateformes conçues pour faciliter le travail en groupe, le suivi des cours et le partage de contenus — le tout accessible depuis n’importe quel ordinateur ou mobile.

Privilégier des outils simples d’usage

Thomas Hervouet-Kasmi travaille en tant que digital learning manager à l’Ipag. - © D.R.
Thomas Hervouet-Kasmi travaille en tant que digital learning manager à l’Ipag. - © D.R.

Des problématiques que l’on retrouve également au sein des écoles de commerce, dont l’enseignement des langues fait partie intégrante. « Au-delà des expatriations proposées aux étudiants, nous développons une offre en présentiel solide, mais aussi une offre en ligne accessible à tous, dans une logique de certification, souligne Thomas Hervouet-Kasmi, directeur du centre de l’apprentissage digital et expérientiel d’Ipag business school. Nos solutions sont disponibles directement depuis un smartphone, ce qui nous permet de rester dans le champ de conscience des étudiants et de nous adapter à leurs usages quotidiens. »

L’accessibilité est un élément clé dans la réussite d’une pédagogie qui s’appuie sur la technologie. « La simplicité d’usage permet de lever la plupart des freins : il ne faut surtout pas ajouter, à la complexité de la langue, une difficulté liée à l’utilisation des outils », insiste Agnès Rémond. Elle précise également : « Les outils doivent être simples, mais aussi capables de s’adapter à chaque utilisateur, en proposant un travail hautement individualisé — ni trop difficile, ni trop facile — ; en lien avec les centres d’intérêt de chacun. »

De cette facilité d’usage dépend directement l’engagement des étudiants dans l’apprentissage des langues. « La première fois est toujours un peu difficile, mais quand les outils ont été pris en main, on se rend compte que les interactions sont nombreuses. Parfois, l’enseignant observe bien plus qu’il n’intervient », commente Thomas Hervouet-Kasmi.

Une évolution de l’évaluation des compétences linguistiques

Agnès Rémond est chief learning officer de Learnation. - © D.R.
Agnès Rémond est chief learning officer de Learnation. - © D.R.

Le thème de la certification est récurrent dans l’apprentissage des langues. « Les employeurs peuvent désormais exiger un niveau certifié lors des entretiens d’embauche. Les nouveaux outils permettent justement de se tester et de s’entraîner de manière progressive, en partant de son niveau initial jusqu’au niveau requis. Le tout est souvent accompagné d’un planning de préparation aux examens », décrit Agnès Rémond.

Aujourd’hui, l’évaluation des compétences linguistiques n’a plus rien à voir avec les pratiques passées. « L’objectif actuel est de mesurer ce que l’on peut réellement accomplir avec une langue : parler, négocier, travailler, parvenir à des compromis, etc., tout en maîtrisant certains codes culturels. C’est tout cela qu’il faut tester pour évaluer les véritables compétences linguistiques », analyse Laurent Rouveyrol.

Un changement des pratiques s’avère donc nécessaire afin de faire évoluer une évaluation « qui se base désormais sur des critères en mouvement  », conclut Isabelle Konuma.