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Télétravail : l’enseignement supérieur apprend les règles du jeu

Par Laura Makary | Le | Management

Dans les établissements du supérieur, le passage à distance n’a pas toujours été évident. Heureusement, la plupart ont trouvé des solutions, pour permettre aux agents et salariés de gérer la transition, voire de tirer le meilleur du télétravail.

La mise à disposition de matériel permet de faciliter le télétravail.  - © D.R.
La mise à disposition de matériel permet de faciliter le télétravail. - © D.R.

Peu d’écoles et d’universités étaient déjà rompues à l’exercice avant le mois de mars. Dans la plupart des établissements, le télétravail demeurait embryonnaire, ou alors timidement en développement. À la mi-mars, il a donc fallu apprendre sur le tas.

« Nous avions en effet commencé à le mettre en place depuis 2018, avec certains personnels Biatss, ils étaient 175 en début d’année à le pratiquer (sur 3142 personnes, chiffres 2018), à raison d’un à deux jours par semaine.

À la suite du premier confinement, les demandes ont été bien plus massives », décrit Céline Hermant, DRH de l’Université de Lille.

Le défi, bien qu’il ait été de taille, semble avoir globalement été bien relevé dans l’univers du public : selon une enquête BVA de juin, 70 % des fonctionnaires ayant télétravaillé durant la crise sanitaire ont trouvé l’expérience « plutôt enrichissante ».

Technique et connexion

 Première étape : équiper tous les personnels. 

Le télétravail n’était pas forcément une habitude à l’école

« Le télétravail n’était pas forcément une habitude à l’école, le confinement a été brutal, comme tout le monde, nous avons dû quitter le campus rapidement, avec un fauteuil ou un écran sous le bras », soupire Cécile Pallot, DRH de l’ICN Business School.

L’école avait un accord sur le télétravail sur la table des négociations depuis un moment et une partie des salariés disposaient déjà d’un ordinateur portable. « Il a fallu équiper les administratifs, cela a pris un peu de temps. Le service informatique a été sur le pont pendant des semaines, pour résoudre les petits problèmes de connexion, les logiciels pas à jour… », se souvient la DRH.

L’appui indispensable du service DSI

Un service DSI complet et fonctionnel est donc clef pour permettre aux personnels de vivre en télétravail. D’autant que pour certains, tout est à faire : une partie des établissements, notamment publics, n’ont pas forcément tout le matériel nécessaire. Il faut alors dégager des budgets. Et se procurer des ordinateurs portables, pour lesquels la demande a - évidemment - explosé cette année.

Ajuster la situation jour après jour

De son côté, l’école d’ingénieurs Télécom Paris avait déjà apprivoisé le travail à distance, à la suite de son déménagement sur le plateau de Saclay. Il a tout de même fallu s’adapter à des pépins imprévus.

« Tout le monde n’avait pas forcément une bonne connexion. Face à cela, nous avons équipé les personnes avec des clés 4G, ce qui a bien marché. Il a aussi fallu revoir nos habitudes de travail. Certains peuvent avoir un réflexe d’impression, qui semblait indispensable, dont l’on peut finalement se passer. Nous avons progressivement appris les bons réflexes », confirme Bénédicte Humbert, DRH de l’école.

 Trouver les bons outils pour s’organiser en interne

Des espaces de travail partagés

Pour avancer, il faut aussi s’organiser. L’Institut des hautes études pour la science et la technologie (IHEST) l’a bien compris, malgré la distance. « La condition de la réussite est d’avoir des outils numériques qui fonctionnent bien, des espaces de travail partagés et de permettre à chacun d’avoir accès à tous les documents nécessaires via le drive », explique Sylvane Casademont, la directrice.

« Nous avons aussi mis en place de nouvelles habitudes : à chaque réunion visio, une personne prend des notes et propose un compte-rendu, ce qui n’était pas toujours le cas en physique, où chacun note de son côté. Là, systématiquement, nous avons une trace écrite », ajoute-t-elle. 

Des réunions régulières mais pas trop 

Lorsque l’on suit trop de réunions, cela devient vite épuisant

Afin de garder le lien avec son équipe d’une dizaine de personnes, Sylvane Casademont met en place des points hebdomadaires, où chacun peut s’exprimer. Le tout en faisant attention de ne pas épuiser les personnels en enchaînant les visios : « Une réunion peut être très efficace à distance, car tout le monde s’écoute, mais lorsque l’on en suit trop, cela devient vite épuisant », concède-t-elle. Un point clef, sachant que les cadres français passent d’ordinaire quatre heures chaque semaine en réunion en moyenne…

Pour bien fonctionner en tant qu’établissement, l’organisation peut aussi se faire au niveau des différentes équipes. L’Estia, école d’ingénieurs basque, a trouvé une solution qui lui convient bien.

« Les responsables des différents services ont mis en place un grand fichier partagé, où chacun déclare s’il travaille, s’il est en congés, sur site ou à distance. Cela nous permet d’organiser des roulements et de savoir exactement qui est où », décrit Amélie Hakala, responsable des études du cycle ingénieur.

Si elle prend un jour de congés par exemple, toute l’équipe sait ainsi qu’elle n’est pas simplement en télétravail. L’école a aussi mis en place un groupe « café du matin » sur Teams, pour ceux qui le souhaitent, avec l’idée d’éviter l’isolement et de recréer de l’informel. 

Recréer du lien, malgré la distance

Garder le lien a été un vrai challenge pour les managers et services RH. Chez Télécom Paris, la solution a été de mettre en place rapidement des formations à distance, d’accompagnement sur le télétravail, sur les outils, mais pas seulement… 

« Nous avons aussi proposé des ateliers de sophrologie, pour aider à se relaxer, d’apprentissage des bonnes postures, du sport, un service psychologique… », détaille Bénédicte Humbert. De quoi créer du lien à distance, entre les différents services, et ainsi tenter de remplacer les indispensables interactions informelles.

L’avenir se fera au bureau, mais aussi à distance.  « Il est certain que la crise sanitaire a été un accélérateur en termes de transformation des process. La période nous permet aussi de nous interroger sur certaines pratiques et d’avancer vers davantage de dématérialisation », acquiesce Céline Hermant, de l’université de Lille, pensant par exemple à de services de signature électronique.

Selon un sondage Opinionway pour « Les Echos », 40 % des Français souhaitent réitérer l’expérience, de façon ponctuelle. 

 

Cinq conseils recommandés par nos interlocuteurs pour rester efficace de chez soi

• Prévoir un lieu dédié, avec une atmosphère de travail chez soi, lorsque cela est possible ;

• S’organiser en respectant ses horaires de travail, en séparant bien le temps professionnel du personnel ;

• S’accorder de vraies pauses ;

• Ne pas hésiter à appeler ses collègues, supérieurs, collaborateurs, en cas de besoin ;

• Faire remonter ses éventuels problèmes, qu’ils soient techniques, organisationnels ou même personnels.