Vie des campus

Learning centers : que peut-on trouver dans ces bibliothèques 2.0 ?

Par Enora Abry | Le | Expérience étudiante

Depuis une dizaine d’années en France, les « learning centers » fleurissent sur les campus. Ces bibliothèques 2.0 visent à répondre aux besoins changeants des usagers. Ainsi, émergent des lieux hybrides : à la croisée d’un centre d’apprentissage et de recherche, de l’espace événementiel et d’un endroit de vie. Campus Matin a visité cinq learning centers en France afin de repérer les points forts de chacun d’entre eux.

Campus Matin est allé visiter des learning centers afin de recenser leurs points forts - © D.R.
Campus Matin est allé visiter des learning centers afin de recenser leurs points forts - © D.R.

Dans le rapport d’activité de l’inspection générale des bibliothèques de 2009, le learning center est défini comme « un lieu architectural, souvent emblématique, [qui intègre] un ensemble de ressources et de services, également accessibles à distance. Selon les situations, le centre constitue une partie de la bibliothèque, ou bien il l’englobe, en associant un ensemble de services pédagogiques et technologiques, avec un accent mis sur l’assistance à l’usager ».

Dans ces nouveaux lieux d’apprentissage, on retrouve ainsi différentes salles où réaliser des travaux de groupes et autres activités. Ce qui correspond à une réalité soulignée par ce même rapport : les manières d’apprendre évoluent, bien plus axées sur la pédagogie par projet.

Mais comment réussir à mixant harmonieusement événements, projets, apprentissage, recherche ? Comment innover et proposer de nouveaux services ? Campus Matin vous propose un panorama à partir des expériences et idées des learning centers de Burgundy school of business (BSB) de Dijon, de l’Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, d’Aix-Marseille Université, de l’Université de Bourgogne et de l’Université de Lille.

1. Lilliad de l’Université de Lille

Lilliad a ouvert ses portes en 2016   - © D.R.
Lilliad a ouvert ses portes en 2016 - © D.R.

Il est impossible de parler de learning center sans évoquer Lilliad auquel il est souvent fait référence. « Quand les étudiants sont entrés la première fois, il y a eu un réel effet “waouh“ et nous avons reçu beaucoup de remerciements », raconte Julien Roche, directeur du service commun de documentation de l’Université de Lille.

Et en effet, difficile de ne pas être impressionné en rentrant pour la première fois dans cette construction de plus de 12 000m2, sur trois niveaux et éclairée par un puits de lumière situé au centre de la rotonde.

L’ensemble est segmenté en trois espaces.

Le pôle bibliothèque

Le premier étage est un véritable lieu de vie  - © D.R.
Le premier étage est un véritable lieu de vie - © D.R.

La partie bibliothèque se déploie sur deux étages. Le premier est fait pour la détente avec des revues, des locations de DVD, des fauteuils et canapés au centre, et sur le côté droit, la cafétéria.

Le deuxième, en revanche, est plus calme et dédié au travail. De part et d’autre : 50 salles de travaux de groupe avec des écrans, une salle pour déficients visuels avec une loupe et un clavier en braille ainsi qu’une salle de recherche documentaire.

L’Xperium

À l’intérieur de l’Xpérium, des doctorants tiennent des stands. - © Enora Abry
À l’intérieur de l’Xpérium, des doctorants tiennent des stands. - © Enora Abry

C’est certainement le lieu le plus novateur de ce bâtiment, et le plus intrigant avec sa façade brillante. À l’intérieur, tout au long de l’année, huit stands animés par des doctorants venant présenter leurs travaux sur des thèmes très divers que ce soit le droit ou la chimie, en fonction de la programmation de la saison. Il est ouvert aux étudiants, ainsi qu’aux lycéens pour lesquels des visites sont régulièrement organisées. Son but : éveiller la curiosité et donner le goût de la recherche.

Le pôle événementiel

À l’intérieur de ce pôle : deux amphithéâtres - un de 300 places avec régie et cabines de traduction et l’autre de 120 places - ainsi qu’un hall pouvant accueillir des espaces de restauration ou des stands. Dans ce lieu sont organisés des colloques de chercheurs ou d’entreprises, des congrès ou des remises de diplôme. Ces animations sont la plupart du temps de nature scientifique.

En ce qui concerne les animations culturelles, celles-ci auront bientôt un lieu de choix avec la future bibliothèque des sciences humaines et sociales de l’Université de Lille qui verra le jour en septembre 2026.

2. L’Hexagone d’Aix-Marseille Université

L’Hexagone a deux terrasses extérieures donnant sur les calanques - © J.Fondacci
L’Hexagone a deux terrasses extérieures donnant sur les calanques - © J.Fondacci

L’Hexagone, c’est un bâtiment de 7000 m2 donnant sur les calanques, pourvu de deux terrasses. À l’intérieur, on retrouve un espace bibliothèque, 40 salles de travaux de groupe, des locaux pour les associations étudiantes, un auditorium, un laboratoire de pédagogie innovante, des espaces sportifs, une cafeteria, un centre d’orientation et un centre des langues. Situé au cœur du campus, l’Hexagone concentre la majeure partie des activités extrascolaires du campus Luminy d’Aix-Marseille Université.

Une grande diversité d’évènements

À l’Hexagone, toutes les animations trouvent leur place : les conférences, les ateliers qui peuvent être animés par les bibliothécaires, les enseignants ou encore les étudiants, des expositions, mais aussi des tournois d’échecs et de console de jeux.

Les espaces intérieurs profitent de la lumière naturelle - © J. Fondacci
Les espaces intérieurs profitent de la lumière naturelle - © J. Fondacci

Cependant, à cause de la crise sanitaire, 50 % des évènements ont été annulés l’année précédente, ce qui oblige les équipes du learning center à repenser leur programme. Résultat : un nombre d’expositions en hausse, car celles-ci sont moins dépendantes du contexte sanitaire. Au programme de ce semestre, une exposition sur les trésors d’Aix Marseille Université.

L’apport de l’UX design

L'UX design aussi appelé « design de l’expérience » est une méthode qui se fonde sur divers critères afin d’évaluer l’expérience de l’utilisateur dans un lieu ou sur un site internet. Cela permet entre autres de savoir si les usagers s’approprient le lieu ou le site, si leurs utilisations sont suffisamment intuitives. Cette méthode a été d’une grande aide au projet de l’Hexagone.

« L’ensemble des espaces semble utilisé, on ne constate pas de zones désertes pour lesquelles on pourrait se dire que la programmation a été trop ambitieuse ou a “à côté“ des besoins. Il faut dire que cette programmation s’est faite en associant le public, et en utilisant les outils d’UX design, ce qui a permis de l’adapter au mieux, au fil de l’évolution et de l’avancée du projet. Une étude UX menée six mois après l’ouverture a confirmé l’appropriation de l’ensemble des espaces proposés », précise Samuel Lespets, responsable de la bibliothèque de l’Hexagone.

3. Le learning center de l'Université de Versailles Saint-Quentin

Ce learning center date de 2013   - © D.R.
Ce learning center date de 2013 - © D.R.

Ce learning center date de 2013, ce qui fait de lui l’un des premiers de France. À l’origine sur ce campus de l’Université de Versailles Saint-Quentin, il y avait une bibliothèque de 900m2 avec seulement 100 places assises, une situation insoutenable avec plus de 4000 étudiants présents.

Désormais, ce bâtiment de plus de 4000m2 construit par les architectes Badia et Berger est agencé sur deux niveaux, avec des passerelles et beaucoup de fenêtres pour un espace très lumineux. Au centre, se trouve les collections dédiées aux sciences et autour, des espaces plus innovants :

  • Une salle de formation avec un mobilier entièrement amovible pour une pédagogie active ;
  • 11 salles de travail en groupe pour 4 à 8 personnes équipées d’écrans ;
  • 6 salles de travail isolées ;
  • un espace dédié au service des langues.

D’autres lieux sont également réservés à la détente, comme la cafétéria ou encore des coins avec des canapés. 

« Le learning center c’est une idéologie complètement différente. Ce n’est pas seulement fait pour travailler, mais aussi pour retrouver ses amis, échanger, et pourquoi pas, faire la sieste ! Les étudiants s’accommodent parfaitement de ces nouveaux espaces. La preuve : ils déplacent les meubles », explique Alexandra Durr-Lazaris, son responsable.

Un learning center à l’écoute

La cafet’ est conçue comme un lieu d’échange et de partage - © D.R.
La cafet’ est conçue comme un lieu d’échange et de partage - © D.R.

Qui de mieux placé pour connaître les besoins des étudiants que les étudiants eux-mêmes ? Le point fort de ce learning center est l’effort déployé pour tenter d’innover selon leurs attentes. De grandes enquêtes de satisfaction sont effectuées tous les trois ans, et d’autres plus restreintes, tous les ans.

En 2020, sur près de 650 répondants, 67 % se déclaraient très satisfaits des services proposés par le learning center. Il y a également des enquêtes moins directes tout au long de l’année avec une boîte à idées, des arbres à vœu, des lettres au père Noël, etc. 

« On tente réellement de répondre aux souhaits des élèves. Nous nous arrangeons avec le service de ménage ou avec l’équipe pour répondre à leurs besoins… La dernière chose que nous sommes en train de mettre en place c’est “la machine à tout“ où l’étudiant pourra trouver plein de petites choses dont il aurait besoin : stylo, feuille… », ajoute la responsable du learning Center.

À l’entrée du bâtiment, nous tombons sur une étrange machine nommée la « matrice ». Elle permet un prêt d’ordinateur sans réservation, sur simple présentation de la carte d’étudiant. Une centaine d’ordinateurs sont ainsi disponibles. « Le nombre suffit tout à fait au besoin des élèves, explique Alexandra Durr-Lazaris. Surtout depuis le confinement, les élèves ont eu tendance à s’équiper. » 

Le learning center, un lieu de vie

Avec les learning centers, les étudiants ont accès à des salles différentes, dès lors, leur utilisation des lieux se fait donc plus longue et diversifiée. « Ils viennent en premier pour travailler, puis ils rencontrent des amis alors ils vont à la cafeteria. Ils retournent en cours et reviennent après pour lire un livre. Le learning center devient un véritable lieu de vie », donne pour exemple Alexandra Durr-Lazaris

4. Le learning center de la Burgundy school of business

Ce learning center possède six étages  - © D.R.
Ce learning center possède six étages - © D.R.

1000m2 sur six étages, c’est la structure du learning center de la BSB de Dijon. À l’intérieur : 300 places assises, dix salles de travaux de groupe et des espaces plus inattendus comme :

  • Une salle de presse ;
  • Un espace pour apprendre des langues en autonomie sur des télévisions donnant accès à plus de 100 chaînes étrangères ;
  • Une salle de visioconférence ;
  • Le career center avec des coachs et des formations ;
  • Une salle « zen » avec des cours de yoga et des lectures à voix haute ;
  • Une tisanerie.

Une programmation culturelle à l’épreuve du Covid

La tisanerie accueille des expositions tout au long de l’année - © Sensationweb
La tisanerie accueille des expositions tout au long de l’année - © Sensationweb

Dans la tisanerie ont lieu toute l’année des expositions, certaines menées en partenariat avec l'Institut Supérieur des Beaux-Arts de Besançon. Dans le reste de la bibliothèque, des formations sont organisées, pour l’aide à la recherche, à la rédaction de la thèse, ou à l’appréhension de certains outils comme Google Scholar. Pendant le Covid cette activité ne s’est pas arrêtée et s’est adaptée à la situation.

« Nous avons maintenu la plupart des événements en les organisant en visioconférence, affirme Sophie Miramont, la responsable du learning center. Compte tenu de la situation, nous avons fait des ateliers sur “Comment garder sa motivation ?“ et surtout “Comment utiliser Teams ou Zoom ?“, des outils utiles pour que l’étudiant puisse suivre correctement ses cours en distanciels. »

Des ressources accessibles à distance

Ce n’est pas l’étudiant qui va au learning center…mais le learning center qui va à lui ! Les bibliothécaires ont certes réussi à utiliser les réseaux pour maintenir leurs formations, il en est de même pour le reste des ressources du learning center de la BSB de Dijon. Un digital learning center a été ouvert, avec plus de 37 000 ebooks, des articles et des vidéos.

« C’est une réponse aux besoins des étudiants. Maintenant les élèves ne se contentent plus d’un livre, ils piochent dans plein de choses. Notre nouveau portail est un outil de découverte qui leur permet d’avoir accès à plusieurs supports », présente Sophie Miramont.

Un nouveau rôle pour les bibliothécaires

Dans ces nouveaux espaces, le rôle des bibliothécaires évolue.

« Au départ, quand on arrive dans une structure pareille, il faut bien évidemment se former, car nous sortons du rôle traditionnel du bibliothécaire », explique Alexandra Durr-Lazaris.

« Maintenant que les prêts sont automatisés avec des bornes, nous avons bien plus de temps pour organiser des formations et des conférences, faire des sélections de livres ou d’articles. Nous avons aussi plus de temps pour accompagner les élèves. Plus important encore : nous avons les outils pour », ajoute Sophie Miramont. 

5. Le Cortex de l’Université de Bourgogne 

Le Cortex sera de nouveau en travaux en 2023  - © D.R.
Le Cortex sera de nouveau en travaux en 2023 - © D.R.

Le 22 septembre 2021, le Cortex de l’Université de Bourgogne a ouvert ses portes après une première phase de travaux. Aujourd’hui, 2775 m2 ont été refaits à neuf, et 5000 le seront après la deuxième phase de rénovation qui se terminera en 2023. Déjà un succès puisque 70 000 personnes s’y sont rendues pendant les quatre premiers mois.

À l’intérieur, 450 places assises, 10 salles de travail en groupe dont cinq équipées d’écrans tactiles connectés et trois salles de formations. Tout est fait pour favoriser l’innovation pédagogique : mobilier amovible, prêt d’ordinateur et de surface inscriptibles (tableaux magnétiques, ardoises) pour faciliter les exposés et les échanges. Mais également, d’autres lieux encore jamais vus…

Un studio vidéo

Le studio vidéo est équipé du logiciel Rapid Mooc - © D.R.
Le studio vidéo est équipé du logiciel Rapid Mooc - © D.R.

Ce studio permet aux étudiants ou enseignants de réaliser des vidéos en toute autonomie pour illustrer un cours, un exposé ou encore un CV original. Ces vidéos sont réalisés à l’aide du logiciel Rapid Mooc qui permet une incrustation directe des corps sur les pages et animations du PowerPoint sur la seule base d’un fond vert.

Lors de la première utilisation de cette salle, un accompagnement est organisé pour la prise en main de l’outil qui comporte également un prompteur.

La salle d’anatomie

La salle d’anatomie est équipée de modèle 3D démontables - © D.R.
La salle d’anatomie est équipée de modèle 3D démontables - © D.R.

Cette salle permet aux étudiants de s’entraîner à partir de modèles 3D démontables. Ils peuvent également y consulter des planches anatomiques.

Un abonnement à Visible Body - une ressource en anatomie 3D- est aussi disponible pour une pratique plus immersive.