Métiers
&
carrières

À Paris-Saclay, deux médiatrices pour « faciliter le dialogue en cas de conflit à l’université »


Pour compléter ses dispositifs visant à améliorer la qualité de vie au travail et dans les études, l’Université Paris-Saclay a décidé de créer une nouvelle fonction de médiateur/médiatrice, et a pour cela nommé deux professeures d’universités. Leur mission : dénouer les situations conflictuelles et faciliter le dialogue. Pourquoi ont-elles décidé de s’engager ? Quel est leur quotidien ? Sandra Charreire-Petit et Catherine Dubernet témoignent.

Vue aérienne du Lumen du campus Moulon de l’Université Paris-Saclay - © UPSaclay
Vue aérienne du Lumen du campus Moulon de l’Université Paris-Saclay - © UPSaclay

Pourquoi avoir décidé de devenir médiatrice universitaire ?

Sandra Charreire-Petit : J’arrivais à la fin de mon mandat de directrice de laboratoire et je souhaitais, à ce moment de ma carrière, faire profiter l’université de compétences que j’avais acquises. Je suis professeure de management. Dans mes recherches, j’ai travaillé sur les systèmes d’alerte - Comment sont-ils déployés ? Qu’arrive-t-il au lanceur d’alerte ? Comment les organisations font parler ou font taire ? etc. - J’espère pouvoir aider l’université et les membres de la communauté sur ce vaste sujet.

Catherine Dubernet : Je suis en fin de carrière, je termine mes fonctions à la Faculté de pharmacie tout début 2026. L’appel à candidatures pour les postes missions de médiateur/médiatrice de l’Université m’a rapidement intéressée. En effet, la communication interpersonnelle, la médiation, etc. font partie de mes sujets de prédilection. Il me semblait cohérent de mettre ces compétences au profit de l’université. À partir de l’année 2026, j’entre dans un statut de retraite progressive dans lequel je consacrerai mon temps professionnel à ce rôle de médiatrice.

Quelles sont vos missions en tant que médiatrices ?

Catherine Dubernet : Nous avons pour rôle de faciliter le dialogue entre les parties en conflit. Cela peut être entre plusieurs membres de la communauté universitaire (étudiants, enseignants, chercheurs, personnels administratifs, etc.) ou entre un membre de la communauté universitaire et l’administration. Notre ambition est de proposer des solutions adaptées et équilibrées qui soient acceptées par l’ensemble des parties pour résoudre les différends.

D’ailleurs, pour avoir une vision plus fine de nos missions, nous sommes en train d’établir une cartographie des besoins potentiels avec les différents services qui s’occupent aujourd’hui des alertes exprimées par des enseignants et des étudiants.

Catherine Dubernet, professeure à la faculté de pharmacie, est médiatrice à l’université Paris-Saclay - © chrispeus.com
Catherine Dubernet, professeure à la faculté de pharmacie, est médiatrice à l’université Paris-Saclay - © chrispeus.com

Sandra Charreire-Petit : Notre périmètre d’actions est potentiellement très large. Comme il s’agit d’une nouvelle fonction, il est difficile d’avoir une idée claire de la volumétrie et de la nature des cas qui vont nous remonter.

Ce qui est sûr, c’est que nos actions vont concerner les personnels, les enseignants-chercheurs et les doctorants sur des sujets pour lesquels il n’y a pas de modes de résolution simples, ou pour lesquels les modes de résolution existants sont dysfonctionnels.

Par ailleurs, pour garantir l’impartialité et l’indépendance de la médiation, nous serons déportées des affaires qui touchent nos UFR/Facultés ou nos laboratoires respectifs. C’est l’un des intérêts d’être deux sur cette fonction.

Des formations sont-elles prévues pour vous accompagner dans cette nouvelle fonction ?

Catherine Dubernet : J’ai déjà réalisé il y a une dizaine d’années une formation de médiation sur 13 mois au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam). Depuis, je suis restée en lien avec l’association des anciens ce qui me permettra d’être au contact de personnes qui font de la médiation tous les jours.

Sandra Charreire Petit : Si je connais les systèmes d’alerte de par mon expérience recherche, j’ai néanmoins besoin d’une formation sur les aspects psychologiques et la conduite d’entretiens de médiation, c’est primordial pour moi de suivre rapidement cette formation.

Comment allez-vous mesurer vos actions ?

Sandra Charreire-Petit : Dans la médiation, nous garantissons aux personnes la confidentialité, ce qui est essentiel. Nous prévoyons de présenter un premier rapport dans le courant de la deuxième année qui portera sur les processus mis en place et sur la nature des cas que nous aurons accompagnés.

Catherine Dubernet : Nous avons une finalité claire d’améliorer la vie à l’université et de contribuer à révéler ce qui peut dysfonctionner dans l’établissement. Notre objectif en tant que médiatrices n’est pas d’étouffer les conflits, nous avons vocation à fluidifier, remettre en mouvement des dossiers crispés.

Sandra Charreire-Petit : En effet, c’est un espace où l’on doit pouvoir parler librement de part et d’autre des dysfonctionnements observés et remonter des alertes génériques ou des propositions de solution pour fluidifier l’ensemble.

Allez-vous travailler avec d’autres acteurs de l’université ?

Sandra Charreire-Petit : Tout à fait, notre action de médiation complète la palette de dispositifs déjà en place pour résoudre des conflits au sein de l’université, mais elle ne s’y substitue pas. Nous travaillons avec la cellule violences sexuelles et sexistes (VSS) qui est déjà en place et qui fonctionne.

Il est question que la médiation soit intégrée au portail commun Dalida pour que les personnes se repèrent parmi l’ensemble des dispositifs existants et aient accès facilement à notre médiation.

Sandra Cherreire-Petit, professeure en management, est élue médiatrice à l’université Paris-Saclay - © DIDIER GOUPY/SIGNATURES
Sandra Cherreire-Petit, professeure en management, est élue médiatrice à l’université Paris-Saclay - © DIDIER GOUPY/SIGNATURES

Catherine Dubernet : Nous travaillons aussi avec les services de santé du travail et de santé étudiante, ainsi qu’avec les représentants du personnel qui accompagnent au quotidien des collaborateurs. C’est essentiel d’être en coordination avec des personnes qui interviennent déjà dans des systèmes d’alerte.

Sandra Charreire-Petit : Par ailleurs, on peut être sollicitées par des personnes directement, mais aussi par des directeurs ou bien des services qui nous saisiraient pour de la résolution de conflits.

Ce type de médiation est-il nouveau dans les universités ?

Catherine Dubernet : Cette médiation n’est pas nouvelle. Elle essaime depuis une dizaine d’années, après que la médiatrice de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur de l’époque Monique Sassier avait signé une convention avec la Conférence des présidents d’université (aujourd’hui France universités) pour mettre en place une médiation institutionnelle à l’échelle des universités, comme il en existe dans les rectorats.

Cela ne s’est pas développé de manière systématique dans les universités, mais certains établissements ont lancé leur médiation avec des périmètres parfois variables, comme à Sorbonne Université, à l’Université de la Rochelle ou celle de Strasbourg.

Sandra Charreire-Petit : A l’Université Paris-Saclay, cette nouvelle fonction sera en lien avec ce qui est mis en place en matière de médiation dans les autres établissements membres de l’université - grandes écoles, universités d’Évry et de Versailles Saint-Quentin-en Yvelines… Il pourra s’agir de relais avec qui nous pourrions être en contact.

Catherine Dubernet : L’idée est effectivement de collaborer avec les médiateurs en fonction dans les différents établissements, y compris dans les organismes nationaux de recherche comme l’Inserm ou le CNRS sur certains sujets d’équipes mixtes de recherche, pour entreprendre des médiations communes quand la situation le nécessite.