Journal de résidence : 5 lieux emblématiques de l’ESR à Toulouse
Par Léa Gerakos | Le | Expérience étudiante
La rédaction Campus Matin s’est installée « en résidence » à Toulouse début juin. Une semaine au cœur de l’enseignement supérieur et de la recherche de Toulouse. L’occasion de visiter plusieurs sites emblématiques, du fait de leur histoire, de leur caractère innovant ou de leur place dans la ville. Suivez le guide !
Une Cité internationale flambant neuve, le bâtiment emblématique de Toulouse school of economics, une arche monumentale et ses fresques insolites à l'Université Toulouse Jean-Jaurès, les trois campus de l'Université Toulouse Capitole et une usine-école… Campus Martin vous transporte dans Toulouse et ses environs.
La rédaction a en effet posé ses bagages à Toulouse du 30 mai au 2 juin afin de rencontrer les acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche. Voici notre « journal de résidence ».
1. Université Toulouse Capitole, des campus témoins de l’histoire
Le premier guide de cette immersion dans la capitale de l’Occitanie est Marcel Marty. Il est conservateur en chef de la bibliothèque de l’Arsenal depuis 25 ans, après avoir travaillé au sein d’instituts culturels à l’étranger. Avec l’appui d’un son livre iconographique regorgeant de cartes à travers les siècles et de photos d’archives, il nous transporte dans le temps et à travers les campus de l’Université Toulouse Capitole.
La faculté de lettres, première terre d’accueil pour les juristes après le capitoulat
La faculté de lettres est construite en 1896. Elle accueille alors des juristes en grande majorité, mais aussi des littéraires qui, plus tard, s’installeront sur le campus de l'Université Toulouse - Jean Jaurès construit dans les années 1960.
Marcel Marty nous fait découvrir le cœur de cette faculté, la salle où se tenaient les conseils. Les murs de la pièce sont couverts des portraits des personnes ayant joué un rôle important au sein de l’établissement : juristes, doyens, professeurs… Ici, pupitres, horloges, chaises, meubles de rangement et d’ouvrages témoignent de la réalité de cette époque et nous font remonter le temps.
L’Arsenal, un héritage militaire
Nous voici face à la faculté lettres, où se trouve l’ancien ouvrage militaire de l’Arsenal de Toulouse. Ce lieu qui accueillant de nombreux ouvriers à partir de 1792, produisait des cartouches.
Deux siècles plus tard, la population d’étudiants est en hausse et un mouvement de réaménagement d’anciens terrains militaires entraine, en 1960, le début des travaux sur le campus de l’Arsenal : c’est d’abord le bâtiment principal qui est érigé, puis la bibliothèque universitaire après 1970.
L’infrastructure est composée d’une aile nord et sud qui regroupent l’ensemble des services administratifs. Au centre, un grand hall mène aux différentes composantes et lieux de formation comme les salles de cours, les laboratoires ou les amphithéâtres. Enfin, nous y trouvons des lieux de vie comme la cafétéria, la cantine ou le gymnase.
La manufacture des tabacs, vestiges de la révolution industrielle
Au 19e siècle, l’État a le monopole sur la fabrication de cigarettes. La manufacture de tabac de Toulouse est la plus grande de France : avec 1000 ouvrières, elle constitue le premier employeur de la ville. Les dernières cigarettes y sont fabriquées en 1967 et la manufacture finit par être classée monuments historiques.
À la fin du 20e siècle, le bâtiment situé allée de Brienne est annexé à l’université et en devient le troisième campus. Plus tard, la manufacture accueille aussi Sciences Po Toulouse.
Le bâtiment répond à un défi logistique : fabriquer, conserver et traiter le tabac et les cigarettes tout en réduisant l’air et la lumière. Aujourd’hui quelques fenêtres anciennes sont conservées, ainsi que les cheminées et l’horloge.
Le cloître des Chartreux ouvre ses arcades aux étudiants
Le cloître des Chartreux appartenait à un ordre religieux prêtant vœux de silence. Une fois restauré, il est inauguré le 12 novembre 2019 par Corinne Mascala, alors présidente de l’Université Toulouse Capitole. Situé à quelques pas du bâtiment de l’Arsenal, il en demeure aujourd’hui un lieu symbolique au milieu duquel a été érigée une statue de Jaques Cujas, illustre juriste et humaniste, le 8 décembre dernier.
2. La prouesse architecturale de Toulouse school of economics
Anciennement logés à la manufacture des tabacs, les personnels et chercheurs de Toulouse school of economics (TSE) s’installent, en 2019, dans un nouveau bâtiment à l’est du canal de Brienne.
Un bâtiment qui appartient à l’Université Toulouse Capitole, dont TSE est établissement composante. Sa construction a d’ailleurs été financé en grande partie par l’Université Capitole sur ses fonds propres, mais aussi par le Fonds européen de développement régional (Feder) et la Fondation Jean-Jacques Laffont.
Chargée des relations presse et des contenus scientifiques depuis novembre 2022, Caroline Pain nous guide à travers les couloirs du bâtiment, l’histoire de sa construction et les enjeux de TSE dans la sphère scientifique.
Les chiffres égrenés donnent une idée de l’ampleur du projet architectural : 52 millions d’euros de coût de construction, quatre auditoriums, cinq salles de séminaires, des espaces d’expérimentation, de réunion et de rencontre, 277 bureaux, 350 personnes et 150 chercheurs.
Des vestiges de la période wisigothe
Situé à quelques pas de l’Église Saint-Pierre-des-Cuisines datant de l’antiquité et encadré par un mur médiéval, le terrain sur lequel est installée TSE recelait une surprise : des vestiges wisigoths, découverts lors de fouilles menées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) en 2011. Le chantier de construction n’a alors pu démarrer qu’en janvier 2013.
Situé par ailleurs sur un ancien parking, le bâtiment est composé de six étages et divisé en trois ailes identiques reliées au centre - « Saint-Pierre », « Canal » et « Garonne », elles sont nommées selon leur orientation par rapport à ces éléments emblématiques de la ville.
Une infrastructure récompensée
Yvonne Farrell et Shelley McNamara, du cabinet Grafton architects, ont imaginé le projet architectural. En 2020, elles ont reçu le prix Pritzker d’architecture pour leurs nombreuses constructions dans le milieu universitaire. La même année, le bâtiment de TSE remporte l’un des cinq prix Équerre d’argent 2020, qui récompense les meilleures réalisations architecturales en France.
L’intérieur en béton s’inscrit dans le style brutaliste. Caroline Pain commente l’aspect extérieur de l’établissement : « 300 000 briques de teintes différentes et caractéristiques de la ville de Toulouse ont été posées. Briques d’origine provenant d’Empeaux, un village de Haute-Garonne, elles permettent de fondre TSE dans le panorama des bâtiments anciens. »
Du haut du sixième étage se déploie une passerelle surnommée le « cloître dans le ciel » qui offre une vue imprenable sur le canal de Brienne, mais aussi la Garonne et l’église Saint-Pierre.
« Nous avons eu beaucoup de chance de pouvoir nous implanter en centre-ville et à proximité d’autres institutions universitaires avec lesquelles nous avons des liens étroits comme l’Université de Toulouse Capitole ou Sciences Po Toulouse. Cela contribue également à l’attractivité de TSE », affirme notre guide.
Un lieu de vie et de partage scientifique
Faire sortir la recherche de nos murs
« Notre volonté à TSE c’est faire sortir la recherche de nos murs, explique Caroline Pain. Nous accueillons régulièrement des invités de marque qui viennent tenir des conférences. En parallèle, les chercheurs organisent des conférences ou workshops d’ampleur nationale et internationale sur leurs sujets de recherche. Ces activités scientifiques font vivre le bâtiment. »
3. La Cité internationale, un nouvel écosystème en plein centre-ville
Face à une pénurie de logements étudiants et une absence de logements dédiés au public international, le projet de Cité internationale est validé en 2019 sous la forme d’une concession de travaux. C’est la société HLM Le Cité Jardins, du groupe Action Logement qui, en tant que concessionnaire, assure à partir de 2020, la maîtrise d’ouvrage, puis l’exploitation du lieu. Après deux ans et demi de travaux, le lieu ouvre ses portes en février 2023.
En son sein, nous trouvons des résidences long séjour et hôtelière, un espace de corpoworking, uun tiers lieu universitaire, une salle de conférences, un restaurant d’une chaîne toulousaine. Les premiers étudiants y sont accueillis à partir de fin mars. La résidence hôtelière, elle, devient accessible dès la fin du mois de mai.
Milène Duro, directrice opérationnelle du département des relations européennes et internationales de l’Université de Toulouse explique le mode de gestion de l’établissement : « Nous avons un contrat de concession avec un bailleur social en fonction des types de logement, le modèle hôtellerie pour les plus courtes durées est géré auprès de Montempo, pour ce qui est des longs séjours c’est le Crous qui est en charge. »
Contribuer à une dynamique de quartier
En parcourant la cour de la Cité, Christophe Sonnendrücker, responsable du pôle immobilier et aménagement de l'Université de Toulouse ne manque pas de souligner la dimension centrale qu’occupe déjà l’établissement :
« C’est plus qu’un projet immobilier, c’est aussi un projet urbain ouvert au quartier et qui participe à sa vie économique et sociale, raconte Christophe Sonnendrücker. Nous voulons que tout type de publics s’y croisent, qu’il y ait une diversité, une dynamique. »
La Turbine, un lieu de vie étudiante accueillant
La Cité internationale abrite aussi la Turbine, tiers-lieu ouvert aux étudiants de l’Université de Toulouse, tous établissements confondus. L’immobilier a d’ailleurs été réalisé par des étudiants de l'Institut supérieur des arts et du design de Toulouse (Isdat).
Dès lors qu’on en pousse les portes vitrées retentissent rires et discussions, sans oublier un karaoké ! Une ambiance conviviale au sein de ce lieu « alternatif » de rassemblement hors des espaces d’enseignement.
4. L’Usine-école Pad’Occ : vers l’industrie du futur
Nous vous emportons, pour une quatrième visite, au cœur de la Maison de la formation Jacqueline Auriol (MFJA), un espace de formation regroupant 1 500 étudiants en génie mécanique spécialisés en aéronautique inauguré le 12 juin par la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Sylvie Retailleau.
Bienvenue dans le vaste quartier de l’innovation campus qui regroupe plusieurs d’établissements liés à l’aéronautique, la robotique, l’espace et plus généralement la recherche ! L’objet de notre intérêt est un démonstrateur d’usine-école proposé par la Plateforme d’accélération vers l’industrie du futur d’Occitane (Pad’Occ).
À nos côtés, Léo Delcros, chargé de communication de Pad’Occ, et Fantine Winocq, chargé de l’animation de l’usine-école. Après avoir traversé une longue allée qui regroupe les ateliers de travaux pratiques (composite, fonderie, soudure, mitrologie…), nous débouchons sur 3000 m2 d’ateliers. En son sein, l’usine-école Pad’Occ s’étale sur 350 m2 avec un large éventail de machines comme un poste de supervision, une découpe jet d’eau ou encore une cellule de fraisage et de contrôle robotisée.
Quels enjeux ?
Portée par l’Université de Toulouse, financé par Bpifrance et la région Occitanie, et soutenue par plus de 50 entreprises partenaires, la Plateforme d’accélération vers l’industrie du futur d’Occitanie fait partie des huit plateformes d’accélération retenues par l’État à travers la France.
L’usine-école est un espace où seront fabriqués des équipements fonctionnels du début à la fin, l’ambition étant d’accueillir les entreprises et de leur permettre de découvrir et tester les outils de demain.
« Nous souhaitons montrer aux entreprises de la région, les briques de l’industrie du futur et les accompagner jusqu’au bout de leur transition », affirme Léo Delcros.
5. L’arche de l’Université Toulouse-Jean Jaurès
Notre visite touche à sa fin. Pour choisir un dernier lieu, nous avons laissé carte blanche à Raphaël Montazaud, vice-président étudiant de l’Université Toulouse-Jean Jaurès. Un établissement dont nous vous avons déjà parlé au travers d’une journée passée avec son directeur de cabinet, Bruno Péran. Grâce à Raphaël Montazaud, une autre partie de l’histoire de l’établissement se livre à nous.
Une infrastructure soucieuse de l’épanouissement étudiant
Implanté dans le quartier populaire du Mirail, le campus de l’UT2J émerge dans les années 1960. Les architectes Candilis-Josic-Woods sont à la manœuvre pour regrouper les étudiants en lettres et sciences sociales. Il est actuellement composé de 17 amphithéâtres, dispersés à travers plusieurs bâtiments indépendants eux-mêmes étendus sur un vaste terrain de verdure où ont récemment été construits des boulodromes.
« C’est l’un des campus les plus récents de France qui a été rénové en 2015. Cette université est un lieu dynamique de vie qui souhaite garantir une vie étudiante épanouissante et un lieu de rencontre dans le quartier du Mirail », déclare Raphaël Montazaud.
Un lieu de formation et de rencontre
Conçue en 1991 pour un coût de 3,9 millions d’euros, l’arche de l’Université Toulouse Jean-Jaurès ouvre en 1992. Le bâtiment marque l’entrée du campus depuis la sortie du métro du Mirail.
L’arche abrite les services informatique, logistique, relations internationales, sports ou encore la Division de la vie étudiante (Dive).
Nous y trouvons également des amphithéâtres et salles de cours, où sont notamment momentanément hébergés des enseignements qui avaient lieu dans le bâtiment du Gai Savoir, occupé de mars à mai 2023 et qui doit être remis en état.
Fauteuils, tables pour manger, distributeurs, balcon avec vue sur l’étendue de verdure du campus, l’arche se veut lieu de repos ouvert à tous les étudiants toulousains.
Des arts muraux comme témoignages du passé
Une fois l’arche franchie, nous voilà à l’intérieur du campus. La façade est surprenante : deux immenses personnages dominent l’espace universitaire. Une femme sur le mur de gauche, un homme sur celui de droite, tous deux masqués, se dressent sur toute la hauteur de l’arche.
Ces œuvres datent d’une occupation passée d’une durée de six mois contre la fusion des universités en 2018. Un épisode douloureux : les coûts de réhabilitation se sont élevés à 800 000 euros. Mais les fresques murales ont été conservées pour témoigner des revendications étudiantes et de l’histoire de l’établissement. À un détail près : l’arme qui était initialement brandie par la femme a été recouverte par un train.