Vie des campus

Afev : « Travailler sur l’intégration de l’engagement dans la formation des enseignants »

Par Marine Dessaux | Le | Relations extérieures

Engagement étudiant et actions solidaires : ce sont les thématiques au cœur des initiatives de l’Association de la fondation étudiante pour la ville (Afev) qui collabore avec les établissements du supérieur via ses 68 pôles en France, et depuis cette année à Bruxelles.

L’Afev gère 15 tiers lieux qui promeuvent l’engagement étudiant. - © Afev
L’Afev gère 15 tiers lieux qui promeuvent l’engagement étudiant. - © Afev

Sandrine Martin, directrice du pôle enseignement supérieur et jeunesse de l’Association de la fondation étudiante pour la ville (Afev), répond à Campus Matin.

Qu’est-ce que l’Afev ? 

Sandrine Martin : Fondée en 1992, l’Afev s’engage pour la réussite éducative de tous et la création de liens solidaires, par la mobilisation d’étudiants. Son programme phare est le mentorat d’étudiants qui accompagnent un jeune à domicile, de la maternelle à la première année d’études supérieures.  

Elle compte 500 salariés, présents dans ses 68 villes de France  : nous sommes dans toutes les villes universitaires, jusqu’en Guadeloupe depuis l’an dernier, à l’exception de la région Centre où nous avons dû fermer récemment faute de financement. 

L’Afev, c’est aussi 22 000 engagés  : des bénévoles parmi lesquels 1000 jeunes que nous logeons via les « Kolocations à projet solidaire » (Kaps), et des services civiques. 

Vous êtes présents dans de nombreuses universités, qu’en est-il du privé ? 

Sandrine Martin, directrice du pôle enseignement supérieur et jeunesse de l’Afev. - © D.R.
Sandrine Martin, directrice du pôle enseignement supérieur et jeunesse de l’Afev. - © D.R.

L’Afev s’est originellement construite avec les universités, mais nous développons beaucoup nos partenariats avec les grandes écoles, dernièrement avec l’ICN à Nancy. D’autant plus que 50  % des engagés de l’Afev sont issus de milieux modestes, nous aimerions que ces chiffres soient plus répartis en termes de catégories sociales. Nous avons actuellement tout de même plus de 20  % d’engagés qui sont des enfants de cadres.  

Avec Impact Campus, par exemple, nous sommes sur des positions similaires sur la généralisation de l’engagement même si, contrairement à eux, nous ne sommes pas pour le rendre obligatoire.  

Quant aux plus petites structures, cela dépend beaucoup des équipes en local. Nous sommes sollicités par des écoles privées qui ont compris que nous pouvions participer à une expérience étudiante réussie.  

Quelles sont vos autres actions ?  

Via Démo’Campus, nous organisons des ateliers d’accompagnement à l’orientation en partenariat avec les établissements scolaires et les collectivités locales, ainsi que des immersions au sein des établissements d’enseignement supérieur. Nous organisons aussi des actions dans les lycées autour du développement durable, l’égalité femmes-hommes, etc. 

La démocratisation de l’ESR est un enjeu fondamental pour lequel nous nous mobilisons notamment en luttant contre le décrochage en première année de licence. Ce qui passe par du mentorat d’accueil lors des six premiers mois de l’étudiant à l’université. Cet accompagnement n’empiète pas sur la mission des tuteurs  : il s’agit de lutter contre l’isolement.

À l’Université Bordeaux Montaigne, par exemple, nous avons accompagné plus de 150 jeunes ce début d’année universitaire. 

L’Afev gère, par ailleurs, 15 tiers lieux étudiants, qui tournent autour des questions de l’engagement. Ils se trouvent souvent sur les campus ou dans les quartiers prioritaires, en lien avec les Kaps.

Renforcer et mieux reconnaître l’engagement

L’Afev défend une meilleure reconnaissance de l’engagement étudiant dans les parcours universitaires. Elle estime que l’engagement peut toujours « être développé de plus en plus ». Et pour cause : l’association comptait 9 000 étudiants engagés il y a trois ans, un chiffre qui a doublé en une année.

L’association observe cependant des modalités d’application hétérogènes de la reconnaissance de l’engagement par les établissements, depuis la loi de janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté. Elle a donc entrepris de les répertorier, « parfois UFR par UFR et filière par filière », pour les rendre plus facilement accessibles aux étudiants qui s’engagent. Elle espère cependant voir naître un jour des modalités de reconnaissance communes.

L’Afev met à disposition la plateforme REEC qui permet de valider l’engagement sans passer par un oral ou un rapport. Elle souhaite ainsi faciliter la tâche des universités qui manquent parfois de personnels dédiés.

Quid de l’engagement dans la formation des futurs enseignants ? 

Pour la réforme de la formation des enseignants, nous aimerions travailler sur l’intégration de l’engagement dans le nouveau parcours. Les Inspé font partie des endroits où nous avons le moins de bénévoles, les étudiants manquant de temps.

Pourtant, beaucoup de nos engagés s’orientent vers l’enseignement. Et puis, que tous les enseignants de France aient fait une année de mentorat, cela serait un message très positif pour les familles.   

Avec qui travaillez-vous ? 

Nous avons un partenariat avec le Cnous et les Crous (qui font partie des bailleurs pour les Kaps), France Universités et les réseaux comme Vécu des vice-présidents « vie étudiante » et la Courroie, qui rassemble les responsables orientation et insertion des universités.

Depuis septembre, nous travaillons avec la Fage pour mettre en commun nos forces sur la lutte contre le décrochage précoce. 

Des exemples de chantiers récents ? 

Nous travaillons avec Nanterre Université à l’intégration de l’engagement dans les cursus. Avec Nantes, nous accompagnons les jeunes de la résidence de la réussite. Avec Auxerre, nous réfléchissons à tout ce qui peut rendre la vie étudiante la plus agréable possible. Nous travaillons avec Aix-Marseille Université à une nouvelle convention intégrant la lutte contre le décrochage précoce.

Quel est votre modèle économique ? 

Nous renforçons notre capacité à aller chercher des fonds européens.

80  % de nos coûts correspondent à de la masse salariale. Nous bénéficions de financement de l’État (plan un jeune, un mentor, par exemple) ; des collectivités locales à tous les niveaux ; de la contribution à la vie étudiante et de campus (CVEC), mais il s’agit de petits financements et il y a là une marge de progression ; des fondations privées et de très petits financements européens.

Nous renforçons notre capacité à aller chercher et gérer ses fonds spécifiques. Nous avons par ailleurs ouvert cette année un pôle Afev à Bruxelles.

Quels sont vos projets à venir ? 

Le 24  avril, nous participons aux dix ans des colocations à projets solidaires de l’Université Toulouse Jean Jaurès.

Notre prochain grand rendez-vous est le 16  mai à Strasbourg  pour nos rencontres expérience étudiante et territoire où sont invités les universités et les responsables enseignement supérieur des collectivités. Cet événement, que nous organisons pour la deuxième fois dans ce format, est accolé au colloque de l’Avuf, dont nous sommes partenaires.  

Côté projets, en septembre prochain, de nouvelles Kaps ouvrent  : à Roubaix avec 80 places et à Villefranche-de-Rouergue, en Aveyron, avec 30 places.