Vie des campus

Quand ChatGPT écrit le début du discours de la ministre

Par Marine Dessaux | Le | Stratégies

En clôture de l’événement annuel de News Tank Éducation & Recherche et Campus Matin, Think 2023, le 26 janvier, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche prononce un discours dont les premières phrases s’avèrent… être écrites par ChatGPT ! Retour sur cette déclaration particulière de Sylvie Retailleau et sur les principales annonces à retenir.

L’intelligence artificielle ChatGPT fait craindre l’augmentation de la triche au sein de l’ESR. - © D.R.
L’intelligence artificielle ChatGPT fait craindre l’augmentation de la triche au sein de l’ESR. - © D.R.

« Nous devons nous assurer que notre système d’enseignement supérieur et de recherche est en phase avec les défis mondiaux tels que la lutte contre le changement climatique, la santé globale et, bien sûr, les technologies émergentes. Nous avons un grand défi devant nous, mais je suis convaincue que nous pouvons relever ce défi ensemble », introduit la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Sylvie Retailleau, le 26 janvier dernier.

Elle s’exprime au travers d’une vidéo à destination des acteurs de l’ESR, réunis à l’occasion de l’événement annuel de News Tank Éducation & Recherche et Campus Matin à Sorbonne Université. Le ton est très protocolaire et sur les premières secondes, Sylvie Retailleau a le visage fermé.

Elle poursuit : « Nous devons travailler collectivement pour réinventer notre système d’enseignement supérieur et de recherche et préparer tous nos étudiants et nos étudiantes à cette transition d’aujourd’hui et bien sûr aux défis de demain. » 

Une introduction écrite par une intelligence artificielle !

Puis elle marque une pause. La ministre dévoile la supercherie : ces quelques phrases ont été écrites de toutes pièces par ChatGPT, l’intelligence artificielle qui rédige discours, articles et copies frauduleuses…

Le discours que je viens de commencer à prononcer, je ne l’ai pas écrit.

« Le discours que je viens de commencer à prononcer, je ne l’ai pas écrit. Ce n’est pas non plus quelqu’un de mon cabinet qui me l’a écrit, c’est ChatGPT. Ce prototype d’agent conversationnel utilisant l’intelligence artificielle dont vous avez sûrement entendu parler et qui est l’une des manifestations des transitions que nous connaissons aujourd’hui. »

Cette nouvelle technologie qui s’apprête à révolutionner les usages rédactionnels, et qui tente déjà certains étudiants et chercheurs, fait ainsi une première apparition dans le discours politique !

Du côté du Secrétariat général à l’investissement (SGPI), son utilisation n’est en tout cas pas d’actualité… « Nous avons essayé de réécrire les appels d’offres de France 2030 et c’était moins bien », sourit François Germinet, à la tête du nouveau pôle « connaissances » au cours de l’une des conférences de la journée.

Les annonces à retenir

Au-delà de cette pirouette, la ministre a poursuivi son propos en direction des participants de Think éducation et recherche. Et elle a fait quelques (vraies) annonces que Campus Matin vous résume. 

Transition écologique : les ateliers de construction du socle commun détaillés

Tous les étudiants de premier cycle devront justifier d’un socle de connaissance commun en transition écologique à l’horizon 2025. - © D.R.
Tous les étudiants de premier cycle devront justifier d’un socle de connaissance commun en transition écologique à l’horizon 2025. - © D.R.

Mentionnés par la ministre en octobre 2022, des ateliers de travail ont été mis en place à partir du 17 janvier afin de généraliser, d’ici 2025, l’enseignement d’un socle de connaissances et compétences aux enjeux de la transition écologique.

Ces quatre ateliers de travail se poursuivent tout le long du mois de février et les premiers arbitrages doivent intervenir avant l’été :

  • Le premier atelier a pour but l’élaboration d’un cahier des charges définissant un socle de connaissances et de compétences auquel tous les étudiants de premier cycle devront être formés (conditionne l’obtention du diplôme).
  • Un deuxième vise à mettre à disposition des enseignants des ressources pédagogiques permettant de nourrir ce socle.
  • Le troisième concerne la reconnaissance et la valorisation de l’engagement des étudiants.
  • Un quatrième fera la synthèse des travaux qui sera ensuite mise en ligne avec un appel à contributions participatives.

Pour enrichir ces travaux, une réflexion sur la formation des enseignants sera également menée pour une mise en place de cette évolution dès la rentrée 2023. 

Faire évoluer l’offre de formation continue sur les métiers d’avenir

Dans un monde où les parcours se diversifient et les métiers changent, « le volet formation continue est indispensable », estime Sylvie Retailleau. Pour parer à inadéquation entre les attentes des étudiants, les formations proposées et les besoins en recrutement des acteurs socio-économiques, elle indique vouloir faire évoluer l’offre de formation.

« Nous devons continuer à offrir des perspectives de carrière à ces étudiants en développant au sein de nos établissements la formation tout au long de la vie, avec par exemple, la possibilité d’obtenir un diplôme par validation des acquis de l’expérience et avec des compléments en formation continue. »

Une stratégie nationale pour l’IA lancée en 2018

Pour renforcer la position de la France dans le domaine de l’intelligence artificielle, une stratégie nationale a été lancée en 2018, dotée de 1,5 milliard d’euros sur la période 2018-2022, rappelle Sylvie Retailleau. Cette dernière a été prolongée dans le cadre de France 2030, avec un budget doté à la même hauteur.

« Nous voyons aujourd’hui que plus de 80 laboratoires sont mobilisés sur le sujet et conscients de la transformation profonde qu’aura l’intelligence artificielle sur notre société », souligne la ministre.

Dans le cadre de cette stratégie, depuis le 26 janvier 2023, c’est Guillaume Avrin qui incarne la fonction de coordinateur de la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle. Il succède à Renaud Vedel, nommé en 2020, et Bertrand Pailhès, choisi lors de la création de poste en 2018.