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« Faire sa mue politique » : la prochaine étape pour la ministre de l’ESR, Sylvie Retailleau

Par Marine Dessaux | Le | Relations extérieures

La nouvelle ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Sylvie Retailleau est aujourd’hui largement appréciée par son écosystème pour sa proximité. Qu’en est-il du grand public ? Les conseils communication de Canévet & associés pour percer davantage.

Sylvie Retailleau fait aujourd’hui partie des  ministres peu connus des français.  - © Twitter Elysée
Sylvie Retailleau fait aujourd’hui partie des ministres peu connus des français. - © Twitter Elysée

Dans la continuité de notre article sur la façon dont est perçue Sylvie Retailleau, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) au terme de ces 100 premiers jours, Manuel Canévet approfondit son analyse.

Manuel Canévet dispense ses conseils stratégiques en communication, notamment aux établissement d’enseignement supérieur. - © Thibault Plaire-Canévet et Associés.
Manuel Canévet dispense ses conseils stratégiques en communication, notamment aux établissement d’enseignement supérieur. - © Thibault Plaire-Canévet et Associés.

Au delà d’une femme chaleureuse et expérimentée, le directeur de l’agence de conseil en communication, Canévet et associés, analyse les écueils à éviter pour s’imposer sur la scène politique.

Campus Matin : La popularité de la ministre auprès de son écosystème peut-elle durer ?

Manuel Canévet : Si Sylvie Retailleau a la grande qualité d'être du sérail, de maîtriser codes et langage de l’ESR elle aura aussi à faire de la politique, à défendre des réformes, des choix budgétaires. C’est alors sa capacité à convaincre, à emporter l’adhésion qui sera déterminante.

En sus d’amour, on lui réclamera des preuves d’amour

Marteler sa sensibilité, sa grande attention aux personnels et acteurs de l’ESR ne suffira qu’un temps. Car assez vite, en sus d’amour, on lui réclamera des preuves d’amour. Les premières épreuves du feu approchent avec la question de l’inflation, de l’explosion des coûts de l'énergie, mais aussi son annonce de travailler sur le nouveau « Parcoursup » des masters, etc.

Dans sa communication, quels sont les points à améliorer ?

Manuel Canévet : On sent la ministre encore peu à l’aise dans l’hémicycle lors des questions au gouvernement ou de l’interview en plateau. Elle l’est beaucoup plus dans le milieu académique (ministère, université). Des mots écorchés, un débit un peu trop rapide, une voix qui monte dans les aigus sont autant de signes que l’exercice n’est pas encore complètement maîtrisé. Elle laisse voir qu’elle connaît ses dossiers. Sans doute un peu moins le sens de la formule politique.

Faire sortir l’ESR de son champ “SAV - usager” pour intéresser la société tout entière

Sur le fond, elle s’en tient à des éléments de langage très factuels, presque techniques. Sa capacité à s’entourer, à progresser, fera la différence sur les prochaines semaines. Car si elle reste dans ce registre, elle n’entrera pas en résonance avec les préoccupations des étudiants, des personnels, de leurs familles. Elle n’arrivera pas non plus à faire sortir l’ESR de son champ “SAV - usager” pour intéresser la société tout entière.

Au-delà du fond, il faudra alors réaliser un sans-faute sur la forme. Se rendre visible dans les médias et faire croître sa notoriété. Elle fait aujourd’hui partie des ministres peu connus des français. Et déjà en août, elle se situait dans le tiers inférieur du Baromètre de confiance politique (Harris Interactive LCI) des ministres de ce gouvernement.

Quels conseils pour la suite ?

Faire sa mue politique

Manuel Canévet : La transformation à opérer : faire sa mue politique, ne pas se contenter de capitaliser sur son extraction ESR. Car, si c’est le cas, elle sera cantonnée dans le rôle de technicienne, de médiatrice. Or, l’ESR a besoin d’une ministre politique, qui porte une vision et défend son portefeuille.

Sa capacité à être une ministre qui pèse dans le débat public lui permettra de peser dans le gouvernement et donc y défendre avec efficacité des choix budgétaires ou législatifs.

Sur la forme : garder son style direct et chaleureux, mais travailler à poser sa voix, adapter son discours en fonction des médias et des canaux de communication. Ne pas nécessairement devenir la femme-orchestre de ce ministère. Faire passer des messages aux étudiants ne passe pas par ouvrir un compte Tik-tok à la ministre.