Numérique

Hybrider votre cours ? Suivez le guide !

Par Catherine Piraud-Rouet | Le | Pédagogie

Un groupe de recherche européen a établi une typologie de différentes formes d’hybridation, propre à servir de fil rouge à tous les enseignants et formateurs intéressés par l’adaptation de leurs cours.

Campus Matin vous livre tous les conseils pour se lancer, ou développer le mix présentiel-distanciel, selon deux des chercheurs impliqués.

Hybrider votre cours ? Suivez le guide !
Hybrider votre cours ? Suivez le guide !

Un peu de vocabulaire pour commencer. Par « hybride », on entend tout dispositif de formation (cours, formation continue) qui s’appuie sur un environnement numérique (plate-forme d’apprentissage en ligne).

Ce dispositif propose aux étudiants des ressources à utiliser ou des activités à réaliser à distance (en dehors des salles de cours) et en présence (dans les salles de cours), selon une répartition et des modalités variables.

Six types d’hybridation des enseignements

Une typologie de six modèles d’hybridation des enseignements a été établie par le projet de recherche européen Hy-Sup, qui a rassemblé, entre 2009 et 2012, six universités francophones, rassemblant 25 chercheurs suisses, français et belges.

Ce travail, mené bien avant la crise sanitaire et le confinement, reste-t-il valable ? « Ce sont des configurations toujours pertinentes aujourd’hui, et susceptibles de donner un cadre d’auto-positionnement, ainsi que des pistes de progression, aux enseignants, formateurs et responsables d’établissements », précise Marcel Lebrun, professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université catholique de Louvain et membre de cette communauté de chercheurs.

Cette typologie intègre 14 critères, dont la dimension présentiel-distanciel ne constitue qu’un élément.

« Ces modèles ne constituent que des cadres théoriques : la plupart du temps, ce qui est mis en place par les enseignants relève de plusieurs types à la fois », commente Marcel Lebrun pour Campus Matin.

« Il n’y a pas de dispositif a priori meilleur qu’un autre. Il faut le situer par rapport aux objectifs poursuivis, au public concerné et à la discipline enseignée », ajoute Bernadette Charlier, professeure en sciences de l’éducation à l’université de Fribourg, également chercheuse au sein de ce projet.

Comment entrer au mieux dans l’hybridation ?

Marcel Lebrun est professeur en sciences de l'éducation de l’Université catholique de Louvain, en Belgique - © DR
Marcel Lebrun est professeur en sciences de l'éducation de l’Université catholique de Louvain, en Belgique - © DR

Deux maîtres-mots : mutualisation des pratiques et co-formation. « Les enseignants doivent oser sortir de leurs amphis et leurs labos pour présenter leurs dispositifs pédagogiques à leurs collègues. Puis s’appuyer mutuellement avec ceux-ci pour se former : pas d’innovation pédagogique sans vision partagée  », précise Marcel Lebrun.

Pour monter en compétences, s’appuyer sur des centres spécialisés (notamment les services universitaires de soutien à la pédagogie), mais en prenant soin de conjuguer d’emblée utilisation des outils numériques et approche pédagogique.

Il est recommandé de manifester une profonde envie de changement. « Il faut basculer d’une logique de savoirs à une logique de compétences, développer esprit critique et travail d’équipe », pointe Marcel Lebrun.

Laisser maturer. « La crise sanitaire actuelle a amené de nombreux établissements à se lancer dans l’hybridation sur le mode “urgence“, mais attention à la précipitation, qui peut être source de catastrophes si ces nouvelles pratiques ne sont pas assez éprouvées et maîtrisées  », prévient Bernadette Charlier.

« Il n’est pas question d’hybrider ou de bouleverser tout votre cours en une seule fois, renchérit Marcel Lebrun. Prendre le temps de tester chaque initiative, de préférence avec des collègues, et à la fin du semestre, se réunir et faire le point sur ce qui marche vraiment. »

L'étudiant au centre

Penser autrement la scénarisation pédagogique, non plus en fonction du contenu du cours et de ce que l’enseignant souhaite transmettre, mais aussi, et surtout, de ce qu’il veut que les apprenants en fassent. « Ce qui nécessite de se projeter pour imaginer comment l’étudiant va utiliser ces ressources, chez lui, sur son lieu de stage ou de travail », précise Bernadette Charlier.

Dans cette optique, éviter de transposer purement et simplement à distance ce que l’on faisait en cours magistral, en se filmant en train de donner son cours, ou se reposer trop sur la mise en ligne de ressources, notamment documentaires. L’outil digital exige interactivité et séquences courtes.

Oser inverser les perspectives. « L’enseignant doit prendre un chapitre détenant de bonnes ressources sur Internet, répartir les étudiants par petits groupes et leur faire faire des recherches sur tel ou tel sujet, recommande Marcel Lebrun. Puis leur demander de présenter leurs travaux à leurs camarades et en faire sortir des questions, auxquelles, seulement, il va s’atteler à répondre. »

Ce modèle de classes inversées (flipped classrooms) étant l’un des exemples les plus aboutis de cette hybridation. L’apprenant est mis en première ligne de ses apprentissages, l’enseignant n’adoptant plus qu’un rôle de coach.

Utiliser le temps gagné par le digital pour redonner du sens à la présence, en cultivant notamment la relation socio-affective avec les étudiants, via des échanges plus informels, plus riches, que ce soit à distance ou en présence.

« Il s’agit de reconnaître aux étudiants une véritable identité », souligne Bernadette Charlier.