Vie des campus

Départs en série à la tête de groupes et écoles privés


Ynov campus, Omnes Education, Pôle Léonard de Vinci… Depuis cet été, pas moins de six écoles ou groupes d’enseignement supérieur privé ont connu un changement de gouvernance. Des départs parfois liés à des décisions personnelles, mais aussi à des résultats décevants, voire des situations de crise interne. Épiphénomène ou symbole d’une certaine fébrilité du secteur, confronté à des vents contraires, notamment sur l’apprentissage ? Petit tour d’horizon.

Départs en série à la tête de groupes et écoles privés
Départs en série à la tête de groupes et écoles privés

C’est le dernier départ en date. Le 18 septembre, Montpellier Business school (MBS) annonçait que son directeur général depuis mai 2019, Bruno Ducasse, quitterait ses fonctions en octobre 2025. Une décision qui serait personnelle.

Si la gouvernance de l’établissement indique préparer « depuis plusieurs mois le processus de recrutement afin d’assurer une transition harmonieuse et de poursuivre la dynamique de développement stratégique de MBS », son successeur n’est toutefois pas encore annoncé. Ce devrait être le cas lors d’une conférence de presse prévue le 8 octobre.

Collège de Paris et Pôle Léonard de Vinci

Vincent Rouaix est le nouveau président du Collège de Paris. - © LinkedIn
Vincent Rouaix est le nouveau président du Collège de Paris. - © LinkedIn

Le 15 septembre, ce sont deux groupes importants dans le paysage de l’enseignement supérieur privé qui procédaient à un changement de gouvernance.

Le Collège de Paris d’abord : lors d’une assemblée générale, Vincent Rouaix est choisi comme nouveau président à la place d’Olivier de Lagarde, cofondateur du groupe et qui occupait ces fonctions depuis 2010. Ce dernier demeure néanmoins actionnaire principal et membre du comité de surveillance.

Si l’objectif affiché de ce changement est «  d’accompagner la structuration des activités en fort développement ces dernières années », le groupe a connu des difficultés, notamment après les révélations de Mediapart en avril 2025 concernant Ridouan Abagri, fondateur et associé du Digital College, une des écoles du groupe, sur de possibles détournements de fonds. Le groupe avait alors lancé des audits internes, tout en défendant le projet pédagogique de l’école.

Autre départ, plus inattendu, celui de Nicolas Glady de la direction générale du Pôle Léonard de Vinci, une petite année seulement après son arrivée en provenance de Télécom Paris. Il avait pris la tête du pôle au moment de l’entrée du groupe AD Education au capital et du passage au statut de société à mission.

Durant son mandat, il a notamment instauré un comité de direction chargé « d’éclairer et d’accompagner le pôle dans la mise en œuvre de notre mission et l’atteinte des engagements », et piloté l’ouverture d’un campus à Montpellier, où les programmes Grande école de l’école d’ingénieurs Esilv et de l’école de commerce EMLV sont déployés depuis la rentrée 2025. Les raisons de ce départ ne sont pas connues. Lui succède Martin Coriat, directeur général d’AD Education depuis 2020.

Ynov, Omnes, Talis…

Rémi Ehrhart est le nouveau directeur général d’Ynov depuis le 1er septembre 2025. - © S.Ladeuix
Rémi Ehrhart est le nouveau directeur général d’Ynov depuis le 1er septembre 2025. - © S.Ladeuix

Début septembre, c’est au sein du groupe Ynov que la direction générale évolue : Anil Benard-Dende, après trois ans d’exercice, cède sa place à Rémi Ehrhart.

Celui-ci conserve ses fonctions précédentes de directeur général d’Aken écosystèmes, foncière immobilière qui construit et exploite des campus sur lesquels sont installées les écoles d’Ynov. Elle est détenue par la holding OBI, actionnaire majoritaire d’Ynov.

D’autres annonces ont lieu au cœur de l’été, avec le départ fin juillet d’un dirigeant emblématique du secteur : José Milano, président exécutif d’Omnes Education depuis juillet 2023 après y avoir été directeur général délégué puis directeur général. À sa place est nommé Marc-Henri Desportes, passé notamment par BNP Paribas, Atos ou encore Woldline, société européenne de paiement numérique, et qui connaît là son premier poste dans le secteur de l’enseignement supérieur. Omnes est détenu à majorité par le fonds d’investissement Cinven.

News Tank apprend aussi en juillet que Marc Adler a pris la présidence de Talis Education Group en février 2025, remplaçant Yves Hinnekint, qui présidait le groupe depuis juin 2021, après en avoir été le DG à partir de janvier 2020. Une réorganisation qui intervient alors que la filiale Talis Paris de Talis Education Group a été placée en redressement judiciaire le 15 mars 2025. Le chiffre d’affaires de la filiale est passé de 7,53 millions d’euros en 2023 à 5,75 millions d’euros en 2024, affichant un résultat net négatif (-1,13 millions d’euros).

Avis de tempête sur l’apprentissage

Faut-il voir dans cette vague de départs les premiers effets de difficultés financières dans le secteur de l’enseignement supérieur privé ? Avec d’abord une concurrence de plus en plus forte, de nombreux groupes ayant développé ces dernières années des implantations en France exigeant des investissements conséquents.

Par ailleurs, beaucoup d’établissements du supérieur privé ont misé sur l’apprentissage, depuis la loi de 2018 qui a ouvert les conditions, et avec l’accompagnement financier de l’État pour ce système au sortir du Covid, permettant de dépasser le million d’apprentis fin 2024.

Un « âge d’or » qui a pris fin, déjà début 2025 avec la baisse des aides aux entreprises embauchant des apprentis de niveau master, et surtout avec l’entrée en vigueur de plusieurs décrets le 1er juillet dernier, prévoyant :

  • La mise en place d’une participation forfaitaire obligatoire de 750 € pour l’employeur à chaque nouveau contrat d’un apprenti ;
  • La minoration de 20 % du niveau de prise en charge des actions de formation par apprentissage lorsque les enseignements dispensés par le CFA sont réalisés à distance pour au moins à 80 % de leur durée totale.
  • La modification des modalités de versement aux CFA des niveaux de prise en charge du contrat d’apprentissage, désormais calculé au prorata du nombre de jours effectivement réalisés par l’apprenti dans le cadre de son contrat, et non pas au mois commencé.

Et ce n’est pas terminé. Une nouvelle révision des niveaux de prise en charge des contrats est déjà prévue pour mai 2026 après une phase de révision menée par France compétences.

À cela s’ajoute la volonté du Gouvernement, via notamment le projet de loi de régulation de l’enseignement supérieur privé, de « soumettre le financement de l’apprentissage à des critères de qualité de la formation », comme l’indiquait Philippe Baptiste, ministre chargé de l’ESR en juillet 2025. Pour cela, une meilleure coordination est prévue entre son ministère et celui du travail, responsable du registre national des certifications professionnelles (RNCP).