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Au Cnam, l’hybridation en soutien aux programmes d’ouverture sociale

Par Catherine Piraud-Rouet | Le | Pédagogie

Le Conservatoire national des Arts et Métiers propose divers programmes visant à renforcer l’employabilité de publics en difficulté : bacheliers professionnels, décrocheurs, détenus… Une mission d’ouverture sociale qui fait la part belle, avec succès, aux enseignements hybrides.

Campus Matin revient sur cette approche avec Pierre Rieben, directeur du Réseau de la Réussite du Cnam.

La part de distanciel tend à représenter la moitié des enseignements dans ces parcours - © Sandrine Villain
La part de distanciel tend à représenter la moitié des enseignements dans ces parcours - © Sandrine Villain

En 2019, près de 440 personnes fragilisées sur le plan des apprentissages et de l’insertion (bacheliers professionnels, décrocheurs, détenus…) ont bénéficié d’une formation gratuite, adaptée à leurs aspirations et aptitudes, dans l’un des six programmes proposés par le réseau de la Réussite Vincent-Merle du Cnam.

Autant de parcours qui ont pour caractéristique commune d’être abordés sous la forme hybride : une partie en présentiel, dans des centres du Cnam, et une partie à distance.

Six parcours hybrides pour publics en difficulté ou marginalisés

Ces publics sont recrutés sur entretien de motivation, parfois après première sélection du dossier via Parcoursup.

Afin de leur permettre de mener à bien ce programme hybride, ces étudiants, souvent fragilisés financièrement et socialement, ont tous été dotés gratuitement d’un ordinateur portable.

Bacheliers pros : trois licences générales par apprentissage

Via son dispositif « école Vaucanson », le Cnam propose cette année trois licences générales par apprentissage à une cinquantaine de bacheliers professionnels (répartis sur six de ses sites) et désireux de s’engager dans le supérieur : management ; méthodes et sciences industrielles ; informatique (depuis cette année).

Huit parcours en bac+1 professionnalisant

Ce cursus expérimental, proposé depuis la rentrée 2019, s’adresse à des bacheliers n’ayant pas obtenu de réponse à leurs vœux dans Parcoursup, ainsi qu’à des jeunes ayant quitté leur formation initiale et éloignés de l’emploi.

La formation, comprenant enseignements théoriques, pratiques et période en entreprise de 12 semaines, conduit à un diplôme unique, divisé en huit parcours de professionnalisation : administration et gestion, comptabilité, numérique, tourisme, services à la personne, sécurité, accueil et orientation, construction.

Le Passe numérique : quatre filières pour décrocheurs

Cette autre formation par le projet et en alternance, créée en 2016, s’adresse à quelque 210 « décrochés » du secondaire, issus des quartiers prioritaires, ni en emploi ni en formation, intéressés par les métiers du numérique et désireux de reprendre des études.

À la clé, pour eux : la définition d’un projet professionnel en vue de s’engager dans une filière du numérique (développement, design, maintenance et sécurité, communication). D’une durée de six mois, le Passe numérique offre un diplôme d’établissement de niveau IV (bac).

Le Passe numérique pro : cinq parcours en insertion directe

Ce cursus sur 800 heures - 600 heures de formation, 200 heures de stage -, ouvert en 2019 et menant à un titre RNCP de niveau 4 (baccalauréat général, technologique ou professionnel), s’adresse à quelque 80 jeunes demandeurs d’emploi ou éloignés du marché du travail, désireux de s’intégrer dans un métier du numérique.

Il comprend cinq parcours : intégration web, codage web, médiation numérique, maintenance et sécurité informatique, e-commerce (relation client).

Mais aussi…

Développeur intégrateur designer

Un programme en alternance conduisant à un titre RNCP de niveau 5 (bac+2), qui a rassemblé, en 2019, 24 jeunes éloignés de l’emploi.

Des formations pour détenus

En 2019, le Cnam a également proposé plus de 120 unités d’enseignement à 60 personnes placées sous main de justice, principalement en informatique, management, droit et comptabilité.

Des taux de réussite élevés

Tous ces programmes enregistrent des taux de réussite très satisfaisants (de l’ordre de 65 à plus de 70 %) à l’examen.

Avec des pointes à quelque 80 % pour la filière « bacs pros », contre 5 % seulement des bacheliers pros dans le circuit licence « classique ». Qui plus est, plus de la moitié des diplômés poursuivent - le plus souvent avec succès - leurs études.

L’hybridation, un des piliers de la réussite

L’hybridation favorise les bons résultats obtenus, selon Pierre Rieben, directeur du Réseau de la Réussite du Cnam - © D.R.
L’hybridation favorise les bons résultats obtenus, selon Pierre Rieben, directeur du Réseau de la Réussite du Cnam - © D.R.

Pour Pierre Rieben, directeur du Réseau de la Réussite du Cnam, la dimension hybridation entre directement en ligne de compte dans ces résultats, au même titre que les facteurs apprentissage et pédagogie innovante (travaux de groupe, conduite de projets).

« La part “à distance“ était originellement de 20 %, informe-t-il. Après une période à 100 % en distanciel, crise sanitaire oblige, pour la rentrée, nous nous orientons davantage sur une forme hybride, de l’ordre de 50-50. »

Pour tous ces publics, l’hybridation est en effet un vecteur unique d’apprentissage. « Elle leur permet d’appréhender à leur rythme des matières dans lesquelles ces jeunes ne sont pas forcément à l’aise, comme les maths et l’anglais », analyse Pierre Rieben.

Nous nous orientons davantage sur une forme hybride, de l’ordre de 50-50

L’enseignement à distance est un bon levier pour intégrer ce qui est de l’ordre de la prise de recul et de la réflexivité dans les apprentissages. Davantage qu’en présentiel, où les élèves les plus à l’aise ont tendance à prendre toute la place dans le groupe.

Mais le présentiel s’impose aussi, et de manière plus importante que pour des étudiants plus « classiques ».

« Ces publics plus fragiles ont besoin du contact en présentiel pour soutenir et accompagner leur motivation et leur apprentissage », note Pierre Rieben.

Exercices collaboratifs en classes virtuelles

« Le rapport à l’écrit étant souvent difficile pour ces jeunes, nous les accompagnons à travers des ateliers » - © Dircom Cnam © L.Benoit
« Le rapport à l’écrit étant souvent difficile pour ces jeunes, nous les accompagnons à travers des ateliers » - © Dircom Cnam © L.Benoit

Ainsi, sur la filière « bacs pros », des cours, articulés avec des questionnaires - certains auto-corrigés, d’autres par l’enseignant - sont mis à disposition des étudiants via Moodle. Des exercices collaboratifs sont aussi organisés à distance.

L’enseignant construit une synthèse

« En partant d’une question posée par l’enseignant (par exemple : « les menaces identifiées sur Internet et les parades qu’on peut y trouver »), les étudiants doivent élaborer des fiches d’une base de données sur un thème donné, par sous-groupes de huit. Chacun des groupes cherchant ensuite à évaluer la pertinence des travaux des autres. S’ensuit le regroupement en présentiel, où l’enseignant construit une synthèse », illustre Pierre Rieben.

Même soutien resserré et mixte sur la filière « bac+1 professionnalisant ».

« Le rapport à l’écrit étant souvent difficile pour ces jeunes, nous les accompagnons à travers des ateliers sur la production de leur rapport de stage, par classes virtuelles  », note Pierre Rieben.