Dans le supérieur, des initiatives pour mieux soutenir la santé mentale des étudiants
Création d’un centre de santé mentale dédié aux étudiants à Lyon, formations aux premiers secours en santé mentale, sensibilisation au bien-être, ateliers d’écriture ou de jeux vidéo… de nombreuses initiatives émergent dans les établissements du supérieur pour répondre aux problématiques liées à la santé mentale des étudiants. Que faut-il en retenir ?

Depuis le Covid, les troubles de santé mentale - et notamment au sein de la jeunesse - sont au cœur des préoccupations. Plusieurs établissements d’enseignement supérieur mettent en place différentes approches pour toucher les étudiants et aider ceux qui en ont besoin.
Un espace ouvert à tous les étudiants lyonnais
La Comue Université de Lyon a ainsi ouvert le 102, le premier centre consacré à la santé mentale des étudiants, en janvier 2025. « C’est assez novateur d’avoir un espace transuniversitaire, qui ne dépend pas d’une université ou d’un établissement », estime Lara Benillouche, psychologue au sein du centre.
Ce centre situé en plein cœur de Lyon, dans des locaux prêtés par la ville, est accessible à tous les étudiants de l’académie de Lyon/Saint-Étienne. Il propose des consultations cinq jours sur sept et jusqu’à 19 heures. « Pour répondre à la demande, nous devons agrandir l’équipe et consolider les relations avec les services de santé étudiante et les professionnels du secteur dans une logique de réseau », considère-t-elle.
Mieux prévenir avant de guérir

En parallèle des consultations, le centre propose un volet de prévention et de sensibilisation à travers des ateliers animés par des intervenants extérieurs ou du centre pour préparer la rentrée, favoriser le sport ou parler hygiène de vie, mais aussi des ateliers thérapeutiques menés par des professionnels du centre de santé où les étudiants peuvent se rencontrer et parler de ce qui les touche.
C’est le cas des Respizen animés par un membre du centre. « Chaque atelier a un thème de relaxation différent comme la méditation, l’hypnose, le yoga ou la pleine conscience. On propose aussi des ateliers plus conviviaux, comme les Chat and chill, qui sont ouverts à tous les étudiants et favorisent les rencontres », ajoute la psychologue.
À l’Essec, les actions de bien-être et de prévention des étudiants sont centralisées dans le plan feelgood@essec. « En grande école, on a longtemps considéré que les étudiants n’avaient de problème. Depuis le Covid, la santé mentale a quitté le champ de la psychiatrie pour aller vers la notion de bien-être, et l’offre s’est étoffée. Ici, l’accent est mis sur l’importance d’un suivi, pour former de futurs managers conscients de leur propre santé mentale et de celle de leurs futurs collaborateurs », indique Vanessa Ntakabanyura, psychologue des étudiants à l’Essec.
En plus des consultations individuelles, le centre feelgood@essec propose aussi des conférences sur différents thèmes tels que la gestion du stress, l’hygiène de vie, le sport… Ces conférences, en place depuis un an, font partie du cursus. « En y assistant, les étudiants peuvent aussi gagner des points académiques. C’est une manière de valoriser ces actions », précise la psychologue de l’Essec.
Identifier les risques de troubles chez les étudiants
Toujours dans une logique de prévention, l’Université de Bordeaux a décidé de former des étudiants aux premiers secours en santé mentale. « Cette formation est complémentaire avec tout ce que l’on met en place autour de la santé. Elle permet d’être d’intervenir précocement, de repérer plus tôt des troubles chez des camarades, de savoir comment réagir afin d’orienter vers les bons dispositifs », estime Florence Touchard, coordinatrice du projet Premiers secours en santé mentale.

Cette formation, qui s’inscrit dans un écosystème plus large d’actions pour la santé des étudiants, est organisée chaque semaine sur deux jours pour un groupe de 16 étudiants de l’Université de Bordeaux et d’établissements publics alentour. Depuis le déploiement en 2019, plus de 4 000 étudiants ont été formés.
S’il est impossible de connaître l’impact concret de ces secouristes de la santé mentale, Florence Touchard constate que beaucoup de jeunes viennent consulter après en avoir parlé à un ou une amie. « Ils sont de plus en plus nombreux à venir nous voir quand ils commencent à se sentir mal. Ils n’attendent pas une crise, que ce soit une attaque de panique ou de crise suicidaire pour venir. »
Cette approche d’alerte est aussi en place au sein de l’Essec témoigne Vanessa Ntakabanyura. « En général, un élève qui ne va pas bien présente plusieurs symptômes. Cela peut se ressentir sur ses résultats scolaires, sur sa manière de manger, sur son sommeil, sa consommation d’alcool… C’est pourquoi on accompagne aussi le corps professoral, les associations étudiantes, les responsables de résidences à avoir une vigilance particulière pour repérer des étudiants en souffrance et bien les orienter. »
De nouvelles approches thérapeutiques
L’orientation vers les bons dispositifs de santé mentale est d’ailleurs essentielle. En plus des consultations psychologiques, des ateliers en petits groupes peuvent aider des étudiants qui ne vont pas bien. À l’Ipsa, Catherine Merle, psychologue et responsable des ateliers thérapeutiques, lance cette année des ateliers d’écriture thérapeutique pour les étudiants de l’école d’ingénieurs.
« La solitude est l’une des problématiques principales de la souffrance des étudiants. Certains jeunes ont du mal à se mettre en relation avec les autres. Ces groupes sont assez indiqués pour favoriser ces échanges. L’écriture est aussi un moyen de faire une première introspection quand ils n’osent pas aller voir un psychologue », dit-elle.

Cet atelier ouvert sur inscription à tous les étudiants de l’école permet de faciliter l’expression de certaines émotions mais aussi de partager avec d’autres étudiants.
« Dans ce type d’atelier, l’animatrice psychologue va proposer des thèmes d’écriture qui vont toucher à l’intime. Son rôle est aussi de reprendre les réflexions de chacun pour mettre à jour des dynamiques et tisser des liens entre participants », estime Caroline Merle.
À Bordeaux, certains ateliers sont aussi proposés sur orientation thérapeutique, pour tester une autre approche. C’est le cas des ateliers jeux vidéo qui s’adressent aux étudiants qui ont un peu de mal à parler. « Un psychologue encadre un groupe de quatre étudiants qui vont faire de la médiation par le jeu vidéo. L’idée dans cet atelier c’est de jouer ensemble pour comprendre ce qui se joue en soi », conclut Florence Touchard.